Des jeunes Ambassadeurs veulent lever les obstacles


Dieynaba Ndiom, Augustin Assaba et Mandiaye Pety Badji sont respectivement de la Mauritanie, du Bénin et du Sénégal. Ces jeunes évoquent, entre autres, les obstacles socioculturels à aborder la sexualité, et donc à promouvoir la contraception dans leurs pays respectifs.

Dans mon pays, qui est une République islamique, il est difficile de parler aux jeunes de sexualité », déclare Dieynaba Ndiom de la Mauritanie. Cette demoiselle, Augustin Assaba du Bénin et Mandiaye Pety Badji du Sénégal nous entretiennent de la sensibilisation des jeunes sur la santé sexualité et reproductive dans leurs pays respectifs. Selon elle, les jeunes «sont souvent réticents » à aborder la sexualité. Elle convoque ainsi « les déterminants socioculturels » et « la religion » pour justifier les raisons incitant les jeunes à éviter d’échanger sur ce sujet considéré comme tabou. En plus, Dieynaba souligne que quand on parle de sexualité dans son pays, « on se réfère aux couples mariés, pas aux célibataires ». Pour cette raison, Augustin Assaba du Bénin estime que « l’un des grands défis auxquels il faut s’attaquer en Afrique est de faciliter l’accès aux informations et aux méthodes modernes de contraception ». De ce fait, il invite les dirigeants africains à mettre l’accent sur « comment intéresser les jeunes à adopter la contraception quand ils sont sexuellement actifs ».

Les jeunes scolarisés ayant aujourd’hui de plus en plus accès à des outils comme facebook, twitter, il pense que l’accent doit être mis sur ceux qui ont un niveau d’instruction très bas ou qui n’ont jamais été à l’école. « Surtout que chez nous au Bénin 32,2% des adolescentes qui n’ont aucun niveau scolaire tombent enceintes, contre 3,2% pour celles qui ont un niveau égal ou supérieur à la sixième », informe M.Assaba, soulignant que « pour mieux toucher les jeunes filles non scolarisées, nous nous rendons dans les centres de formation en couture, coiffure, menuiserie, etc. ». Sur place, les équipes chargées de la sensibilisation font comprendre aux patrons « qu’il est de l’intérêt des jeunes d’avoir certaines informations pour se protéger, se soigner quand c’est nécessaire, car ils auront un meilleur rendement », explique Augustin, précisant que dans son pays il existe une « approche innovante avec les clubs non scolaires où nous recensons des jeunes leaders à qui nous renforçons les capacités de base dans le domaine de la santé de la reproduction. Ces derniers sont à leur tour chargés de sensibiliser leurs pairs de retour dans les ateliers en langue locale. Nous sommes allés jusqu’à développer des magazines non scolaires illustrés. Par ce canal, on essaie de faire passer des messages ».

Sur la mutualisation des efforts dans la sensibilisation des jeunes dans des contextes socioculturels différents, Dieynaba Ndiom avoue que « c’est un peu difficile, parce que nous n’avons pas forcément les mêmes valeurs ». Mais, relève-t-elle, « on essaie d’adapter le message au contexte, à la population ciblée. On fait toujours l’état des lieux sur le plan culturel avant toute intervention à partir des moyens dont nous disposons ». De cette façon, « nous essayons de faire passer les messages sans pour autant choquer, car chez nous, la question sexuelle est très taboue ». Pourtant, il n’est pas question, dans les stratégies de sensibilisation, « d’encourager les jeunes à faire le sexe, ce n’est pas cela le message. Nous essayons au contraire de leur donner la bonne information », clarifie Mlle Ndiom. Poursuivant, elle explique : « Quand un jeune décide d’avoir un rapport sexuel au cas où il ne peut plus s’abstenir, nous lui donnons les conseils nécessaires pour éviter d’éventuels dégâts liés par exemple aux Ist/Vih/Sida, aux grossesses non désirées, etc. »

Dans ce cadre, Madiaye Pety Badji du Sénégal estime que le défi majeur pour les jeunes est d’avoir accès aux informations et aux moyens de contraception. « Je pense qu’aujourd’hui pour régler les mariages et grossesses précoces, il faut permettre aux jeunes de jouir de leurs droits. Se marier tôt, je crois n’arrange aucune fille, même pas les garçons, peut-être si ces derniers ont un bon revenu. Il faut que les jeunes aient accès aux préservatifs, aux méthodes modernes de contraception, à des structures où on leur offre des services conviviaux, des structures où la personne ne sera pas stigmatisée », lance-t-il, invitant les gouvernements à tenir leurs promesses. « On l’a dit, redit. C’est le moment pour nos chefs d’Etats de tenir leurs promesses », clame M. Badji qui soutient qu’il est bien de créer des Centres conseils pour les adolescents et les jeunes, « mais s’il n’y a pas un accompagnement, ce n’est pas nécessaire d’en créer », tranche-t-il?

Maïmouna GUEYE