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Laure Nadine Boncoungou : « J’aurais pu tomber enceinte et être chassée de ma famille »

Laure Nadine Boncoungou, 23 ans, est ambassadrice de « SOS Burkina Faso Jeunesse et Défis », un groupe de jeunes soutenu par la Fondation « Plan International ». Depuis 5 ans, elle intervient auprès des jeunes burkinabés pour les sensibiliser à la planification familiale ainsi qu’à la santé sexuelle et reproductive. Interview

Laure Nadine Boncoungou assure un rôle essentiel au sein de sa communauté. Elle n’a que 18 ans lorsqu’elle s’engage en 2012 auprès de « SOS Burkina Faso Jeunesse et Défis ». À travers des plaidoyers animés dans les quartiers et les écoles, cette étudiante en anglais éduque les jeunes à la planification familiale et à la santé sexuelle et reproductive. Une mission cruciale au vu de l’état d’urgence que subit le Burkina Faso sur ces questions : d’après Guttmacher Institute, 40% des femmes non mariées et sexuellement actives âgées de 15 à 24 ans ne souhaitent pas tomber enceinte mais n’utilisent aucun moyen de contraception. Une réalité d’autant plus inquiétante que seulement 1 avortement sur 7 est pratiqué par un médecin ou un assistant de santé formé. A l’occasion d’une table ronde organisée par la Fondation « Plan International », qui regroupe des jeunes militants sous l’appellation « Generation Yes Future », nous avons rencontré Laure Nadine.

Qu’est ce qui vous a motivée à motivée à rejoindre « SOS Burkina Faso Jeunesse et Défis »?

Une de mes camarades âgée de 17 ans est tombée enceinte. Elle ne connaissait rien à la sexualité et a eu un rapport sans savoir comment sont conçus les enfants. À ce moment-là, je me suis dit « si ça lui arrive à elle, ça peut me tomber dessus aussi. » Alors, je me suis informée sur la santé sexuelle auprès des associations et, de fil en aiguille, je suis devenue animatrice.

Est-ce que votre recherche d’informations l’a aidée ?

Non car le mal était déjà fait et l’avortement n’est pas autorisé chez nous (excepté pour sauver la vie d’une femme enceinte, et dans les cas de viol, d’inceste ou de graves malformations fœtales, NDLR). Même le terme « avortement » est tabou au Burkina Faso. Au contraire, c’est elle qui m’a aidée parce que grâce à son problème, j’ai pu éviter de tomber enceinte.

Si l’avortement est interdit, comment procèdent les femmes pour interrompre une grossesse ?

Le plus souvent, elles prennent une infusion. J’ai rencontré une femme qui, pour percer son placenta, a cassé une bouteille de verre jusqu’à en créer de la poudre et l’a ingérée sous forme de décoction. Beaucoup de femmes deviennent infertiles parce qu’elles ont mal provoqué leur avortement.

Il y a t-il une rencontre qui vous a particulièrement touchée au cours de votre engagement ?

J’ai fait la connaissance d’une femme d’une vingtaine d’années qui est tombée enceinte à un moment où elle ne le souhaitait pas. Elle était encore étudiante et au Burkina Faso, lorsqu’on contracte une grossesse, on devient la femme du père de l’enfant. Elle est venue me voir pour savoir comment agir parce qu’elle ne voulait pas se marier et avait envie de continuer ses études correctement.

Quels résultats de vos actions constatez-vous ?

On observe que la planification familiale et la santé sexuelle et reproductive ne concernent pas uniquement les adultes. Au Burkina Faso, le sexe n’est pas censé exister avant le mariage. Mais grâce à nous, les gens comprennent que l’éducation sexuelle doit se faire dès le plus jeune âge. On sensibilise aussi les parents parce que les enfants ne peuvent pas faire les démarches tous seuls.

Quelle est votre plus grande fierté au cours de votre engagement ?

Ma plus grande fierté c’est moi-même. Si je n’avais pas eu accès aux informations sur la santé sexuelle et la planification familiale, je n’aurais pas ce niveau de vie et on m’aurait chassée de ma famille. Aujourd’hui, si j’ai un rapport sexuel, je sais ce que je dois faire pour ne pas ne pas garder ça comme un mauvais souvenir toute ma vie. Je suis fière aussi d’apporter des renseignements aux jeunes. Notre action permet notamment aux filles de jouir de leur corps. Chez nous, une femme qui va vers un homme avec un préservatif, on la catégorise comme prostituée. Mais avec nos plaidoyers, les jeunes finissent par intégrer qu’une femme a le droit de désirer un homme et l’exprimer à sa manière.

Source: Pleine vie

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