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Ces acquis de la pandémie COVID-19 qui bonifient la stratégie des acteurs de la promotion des DSSR et SSR

1 octobre 2021

Depuis décembre 2019, le monde entier vit les conséquences de la pandémie de COVID-19. Une pandémie qui génère décès, peurs et regrets au point que nul ne peut se laisser convaincre qu’il pourrait exister un revers positif de cette médaille qu’elle constitue. Mais à y voir de plus près, malgré les impacts négatifs de la COVID-19, elle a tout de même permis à certaines associations de jeunes et structure de santé de reproduction de réadapter leur stratégie pour en faire même un acquis au profit des Service en Santé de Reproduction.

Elle a le souri jusqu’aux lèvres. Et pourtant nous sommes encore aux toutes premières heures de l’annonce du premier cas positif de COVID-19 en ce début du mois d’avril 2020. Assise attendant son tour de consultation, dame Madeleine gestante, la vingtaine révolue teint noire dans sa tenue traditionnelle se dit confiante de la réorganisation que connait le Centre Hospitalier et Universitaire de la Mère et de l’Enfant Lagune de Cotonou (CHU-MEL), est un hôpital béninois spécialisé dans la santé maternelle et infantile.

«On avait eu très peur quand on était resté à la maison. Beaucoup parmi nous ont refusé de venir ici. C’est le premier jour que moi je suis même venu qu’ils avaient mis l’hôpital en quarantaine et j’ai commencé par prier pour la reprise qui est effective maintenant. Et j’aime comment les choses sont organisées. On n’utilise plus le seul thermomètre pour toutes les femmes. C’est à distance que tout se fait maintenant. Avant, ça allait dans tous les sens. Maintenant tout est propre et depuis le portail on a déjà le but de ta visite. C’est en sécurité depuis l’entrée jusqu’ici et Dieu fera cela sera ainsi pour toujours».

Cette confession de dame Madeleine explique l’adaptation qu’impose désormais la pandémie aux acteurs des services en santé de reproduction. En effet il y a quelques jours avant notre passage, un membre du personnel sanitaire de ce Centre a été touché par la COVID-19. Cent-six autres membres du personnel ont dû être placés en quarantaine, mais l’équipe reste professionnelle et solide selon le ministre de la santé Benjamin Hounkpatin qui est allé mobiliser et galvaniser le moral de la troupe.

En effet l’intérêt et l’importance de la planification familiale a amené le gouvernement béninois à faire voter par l’assemblée nationale le 3 Mars 2003, la loi N°2003-03 relative à la santé sexuelle et à la reproduction qui abroge ainsi celle de 1920. Cette loi  confère à toute personne « le droit d’être informé et d’utiliser la méthode de planification familiale de son choix, qui ne soit pas contraire à la loi ». Mais outre le service public, la société civile met aussi les bouchers doubles pour s’adapter à la pandémie.

Avec très peu de moyens, on peut prendre des décisions…

La pandémie de COVID-19 a permis d’actualiser le système d’information de l’Agence Béninoise pour la Promotion de la Famille selon son directeur exécutif par intérim. Ceci fait suite, à la saisie dès les tous premiers jours de la pandémie de certains partenaires pour évaluer l’impact de celle-ci sur les prestations de l’ABPF notamment la fréquentation des cliniques et pour savoir cela il faut des chiffres. Or pour Ibrahim Moussa, « avant la pandémie, c’est à la fin du mois que chaque clinique envoie son rapport. Du coup, dans la semaine, on a trouvé un dispositif pour avoir les informations par jour. Au début c’était juste le nombre de clients reçus par jour et ça nous permettait de faire l’analyse. C’était en avril 2020». Mais  au fil du temps, « tout s’est amélioré » poursuit-il. Puisque deux mois après, «l’ABPF a procédé à la refonte totale du système d’information. En conséquence, au lieu d’avoir désormais les informations par mois, on a désormais les informations par jour. C’est donc grâce à la pandémie qu’on en est arrivé là. Et ça nous permet de prendre énormément de décisions pour améliorer le travail que nous faisons à l’endroit des clients ».

Pour le Directeur Exécutif par intérim de l’ABPF, il n’y a nul doute donc que leur prestation connaisse une amélioration subséquente dans la phase post COVID-19. A l’en croire, « il y a certaines pratiques qu’on ne peut pas laisser parce que, quand je prends la télémédecine par exemple, le fait pour les clients d’avoir les informations et les services par le téléphone, permet de leur fournir des informations de qualités. Parce que lorsque vous attendez la fin du mois pour cumuler des chiffres vous faites des erreurs. L’autre chose qui est faite, c’est les concertations que nous faisons partout dans le monde à travers des applications. On s’est rendu compte que c’est très efficace et avec très peu de moyens on peut prendre des décisions en ayant des informations comme si c’était en présentiel ».  A cela s’ajoute cet autre atout que l’ABPF a utilisé et qui demeure un acquis : le mouvement d’action de jeunes.

Ces jeunes en question qui ont découvert la panacée d’une stratégie jeune efficace.

Ils sont plus de mille selon le directeur exécutif par intérim de l’ABPF à travailler en collaboration avec cette agence. C’est sous le leadership de Amour Dieudonné Vodounhessi, Président National du Mouvement d’Action des Jeunes de l’ABPF. Son teint clair et sa taille d’un mètre soixante-dix environs couverte par une tenue goodluck couleur noir trahissent son enthousiasme à nous raconter comment ils ont « driblé » la pandémie. « Nous avons vécu cette pandémie avec une grande joie »commence-t-il avant de repréciser ses pensées. « Quand je dis une grande joie, c’est pas que nous sommes fiers de l’arrivée de la pandémie mais on a su s’adapter à cette période de sorte que on n’a pas eu beaucoup de problèmes par rapport à la mise en œuvre de nos activités.

Le Mouvement d’Actions des Jeunes du Bénin a été même félicité par la Fédération Internationale pour la Planification Familiale pour la façon dont nous avons maintenu la constance et déroulé nos activités sans faille pendant la période de la pandémie. L’IPPF qui a notamment disséminé la création des curricula en ligne des vidéo» s’extasie-t-il avant de donner de détails. « J’ai parlé des activités d’éducation complète où on allait dans les ateliers les centres d’apprentissage, les écoles, les mosquées, les églises et autres où on rassemblait les adolescents et jeunes pour leur parler. Lorsque la pandémie est venue on ne pouvait pas réunir les gens mais on a réalisé des vidéos avec nos jeunes formateurs sur toutes les sept composantes de nos cibles. On a lancé des appels à candidature de formation des paire-éducateurs dans chaque département du pays. On les regroupe dans des groupes whatsapp, on fait des séances sur zoom de façon périodique pour s’assurer que l’information passe également. Cette période nous beaucoup aidés à renforcer nos actions en lignes et toucher beaucoup plus de jeunes » ajoute Amour Dieudonné Vodounhessi. Il évoque notamment les exploits du numéro vert mis à disposition par l’ABPF qui est accessible aux jeunes mais n’oublie pas le success story du camp des jeunes tant applaudi par certains partenaires comme l’Ambassade des Pays Bas, l’UNFPA, Care Bénin/Togo, Abms.

Cette rencontre virtuelle a connu l’implication des leaders religieux, maires et jeunes. Des formats sur Messenger ont été aussi créés pour recevoir les informations de sensibilisation à l’endroit des jeunes dans cette période où le taux de grossesses non désirées, les violences basées sur le genre et les mariages forcés prenait aussi une ampleur inquiétante.

Selon Thomas Adam, responsable de la protection de l’enfant à la Direction Départementale des Enseignements Secondaires du Borgou un département situé à l’Est du Bénin, plus de 500 filles sont tombées enceintes au cours de l’année scolaire 2019-2020 dans un rapport publié le 11 décembre 2020. Pour Amour Dieudonné Vodounhessi, ces activités virtuelles ont été d’une grande importance étant donné qu’elles avaient permis de clarifier les valeurs, identifier des mythes et avoir les informations justes. Et en la matière, personne n’a été laissée de côté.

Les jeunes qui n’ont pas de téléphone androïd et non lettrés sont aussi servis.

Seulement 52,5% des jeunes de 15 à 24 ans en 2018 sont alphabétisés. C’est en tenant donc compte de ces données qui ont pour source, l’UNESCO mais publiées sur la page de la Banque Mondiale, que les jeunes de certaines associations ont conçu leur stratégie d’adaptation. Comme le Mouvement d’Action des Jeunes du Bénin, les Jeunes Volontaire pour la Santé qui est un mouvement regroupant les jeunes pigistes de l’Association Béninoise pour le Markéting Social s’est donné comme rôle de sensibiliser les adolescents et jeune pour les sensibiliser sur les Dssr.

Dieudonné Adjé, le Vice-Président chargé de l’employabilité des jeunes nous a raconté comment le mouvement n’a pas subi les effets de la pandémie. Et c’est confiant de la reconnaissance du Partenariat de Ouagadougou des impacts positifs des associations de jeunes pour l’atteinte de la nouvelle vision du mouvement, que le réseau a mis sur pied le projet dénommé « On doit agir ». « Le défi était de concilier COVID-19 et DSSR. C’est ce que nous avons fait sur pratiquement tous nos projets pour offrir des solutions adéquates à nos jeunes frères et sœurs. Tout ça pour le résultat initial du même projet que nous avons atteint » jure-t-il sur notre curiosité insistante.

Pour Dieudonné Adjé, même ce qui pourrait paraître comme un frein, a été prévu et résolu. Il fait allusion aux jeunes qui n’ont pas de téléphone portable ou aux types de téléphones qui ne seraient pas adaptés aux réseaux sociaux ou à leur nouvelle orientation. « Nous avons un numéro à travers lequel nous diffusons les messages. Un message c’est cinq francs peu importe le réseau. Et en février dernier nous sommes repartis et on a vu les jeunes avec lesquels nous avons échangé. Grande a été notre satisfaction de constater qu’ils recevaient effectivement ces messages. Ils étaient même carrément devenus des ambassadeurs dans ce sens que nous avons remarqué que d’autres jeunes ce sont ajoutés. Et tout ça ne se faisait pas avant la période de la pandémie » confie ce jeune leader. Amour Dieudonné Vodounhessi pour sa part explique que pour cette même catégorie de jeunes n’ayant pas accès aux réseaux sociaux, son mouvement a conçu une application et se déplace vers les jeunes cibles pour éviter le rapprochement.

Une solution facilitée par l’autorisation spéciale du Ministère de l’Enseignement Secondaire du Bénin d’intervenir dans toutes les écoles. Pour ce qui concerne la couche non alphabétisée, grâce au fond COVID-19 de l’IPPF, le mouvement d’action des jeunes de l’ABPF a pu se doter d’outils de protection suffisants qu’utilisent les membres lors des déplacements jugés « inévitables » vers cette couche qui pour l’occasion bénéficie aussi de masque de protection et de gels. « Nous discutons surtout avec les patrons pour qu’ils continuent à renforcer le dialogue même après notre départ » a conclu Amour Dieudonné Vodounhessi.

Les acquis qui vont booster les stratégies jeunes au profit des DSSR.

« En matière d’acquis, ce que nous pouvons utiliser comme politique, c’est de mettre en avant la force de nos canaux digitaux à travers lesquels nous pouvons atteindre un grand nombre de jeunes » se réjouit Dieudonné Adjé. Et « L’autre chose » poursuit-il, « c’est qu’on a su juguler la combinaison DSSR et COVID-19. Ce qui veut dire que si d’autres pandémies survenaient, on sait comment s’y prendre. Nous sommes préparés en matière de recherche action, en matière d’autonomisation, en matière d’égalité genre et en matière de droit sexuel et santé de reproduction de façon générale. Nous avons les acquis nécessaires pour impacter positivement nos pères».

La bonne nouvelle selon le Directeur Exécutif par intérim de l’ABPF Ibrahim Moussa, c’est que malgré cette pandémie, « le cap est maintenu. Actuellement le Bénin à l’instar d’autres pays du Partenariat de Ouagadougou, est dans un processus de réengagement. Nous sommes en train de faire des travaux que coordonne d’ailleurs l’ABPF au niveau de la société civile en appui avec l’agence nationale des soins de santé primaires pour que les engagements de 2030 du Bénin soient pris d’ici septembre 2021 ». Ce qui fait dire à Amour Dieudonné Vodounhessi que la pandémie « nous a appris que nous pouvons utiliser plusieurs moyens pour atteindre les adolescents et jeunes et leur donner de informations de qualité ». Un acquis qui bonifie les stratégies jeunes malgré les dégâts de la pandémie que ne perdent pas de vue ces acteurs de la Pf et des Service en santé de reproduction.

Loin d’être seulement dévastatrice, la pandémie liée à la COVID-19 semble un couteau à double tranchant qui enrichit les stratégies des stratégie des acteurs de la DSSR et SSR engagés dans les services en santé de reproduction. Un atout qui devrait aider à mieux atteindre les nouveaux objectifs du PO.

Romain Dékadjevi

Publié le 30-09-2021 dans MAMABENIN

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