21 mars 2023
Tolérance ZERO contre les violences basées sur le genre est tout un programme au Bénin. Dans ce cadre, le gouvernement multiplie les initiatives visant une prise en charge holistique, mobilise les acteurs à tous les niveaux et met à contribution tous les partenaires. C’est ainsi qu’en juillet dernier, 4 ministères intervenant dans le domaine que sont : le ministère en charge des Affaires Sociales et de la Microfinance, celui de la Santé, celui de la Justice et le ministère en charge de l’Intérieur et de la Sécurité publique ont pris le 8 juillet 2022 un arrêté interministériel portant conditions de délivrance du certificat médical aux victimes de violences basées sur le genre*.
Faciliter l’accès des victimes à la prise en charge
Docteur BIGOT Cédric Parfait (Médecin spécialiste en médecine légale et en évaluation du dommage corporel) précise que « La prise de cet arrêté a été motivée par un souci de faciliter l’accès des survivantes et des survivants de VBG à la justice. Le certificat médical est un moyen de preuve important dans la prise en charge judiciaire. Ce certificat doit en principe être délivré à la victime après consultation médicale ». Dans la réalité, les difficultés subsistent quant à l’opérationnalisation de la prise en charge sanitaire des victimes survivantes de VBG, à travers les réquisitions pour le certificat médical sponsorisé par l’Etat.
En effet, ce mécanisme de prise en charge par l’Etat exige des formalités administratives à divers niveaux, du commissariat aux centres de santé et de promotion sociale jusqu’au tribunal. Les modalités de paiement de dépenses encourues sont complexes, sans compter que les frais connexes dont les frais de déplacement de la victime et de l’accompagnant, d’hospitalisation, des tests biologiques, de détection de grossesses, etc., ne sont pas couverts par le certificat médical encadré.
Dans la gestion des cas critiques, l’accueil et l’hébergement des femmes et filles en détresse également non pris en compte dans le certificat médical, sont un sujet de grande préoccupation. La constitution de dossier justificatif de prise en charge sur réquisition est ainsi contraignante. C’est ainsi que, pour reprendre encore Docteur BIGOT Cédric Parfait, « de nombreuses victimes renoncent à se faire établir ce document médico-légal à cause de son coût ».
Un ensemble de mesures pour renforcer la prise en charge
Des victimes accompagnées aux centres de santé sont parfois délaissées en raison des failles dans l’organisation de la prise en charge. Les réquisitions pour prise en charge des victimes de Violence Basée sur le Genre ne sont pas toujours suivies de remboursement des frais aux Officiers de Police Judiciaire, dans les délais. Le remboursement des frais de prise en charge par l’Etat sur réquisition est certifié par le tribunal. Or, par manque de moyens, ou craignant les conséquences du point de vue social, les victimes laissent tomber les procédures sur réquisition et se soumettent au règlement à l’amiable. Il faut noter l’absence de budget pour la couverture des frais de communication et de déplacement au commissariat, pour sauver la victime de VBG, comme c’est le cas au CPS et à la santé.
Le Ministère en charge des Affaires Sociales et de la Microfinance et autres organisations de la société civile, profitant de l’appui de l’UNFPA, œuvre inlassablement en matière de prévention et de référencement des cas pour la prise en charge sanitaire et psychologique des victimes survivantes de VBG. Le Projet « Prévention des VBG, protection et autonomisation des filles et femmes en temps d’épidémie COVID19 » financé par le du Gouvernement du Canada à travers l’UNFPA est une opportunité pour renforcer la prise en charge des survivantes des VBG. Dans le cadre de ce projet, un montant forfaitaire est proposé par victime, au niveau des CPS, pour organiser le paiement direct sur justification des dépenses effectives ; il permet ainsi de contourner les différents blocages et autres difficultés. Toutefois il reste encore des difficultés à surmonter. La fourniture des justificatifs, nécessitant les pièces d’identité et les factures normalisées, requiert un appui et l’accord des autorités locales. L’effort d’accompagnement des comités SOP et « les hommes s’engagent » doit se poursuivre et être renforcé.
En somme, cet arrêté interministériel est un début de solution pour la prise en charge sanitaire des survivantes de VBG au Bénin. Selon Dr Bigot, il « …vient régler le problème de la procédure de délivrance du certificat dans les structures sanitaires publiques. Il en fixe le coût. Il est également prévu que ce certificat soit pris en charge par l’État (frais de justice criminelle) pour toutes les victimes qui portent plainte au commissariat de police ou au tribunal directement. Le certificat médical intervient surtout dans la prise en charge judiciaire des victimes. Mais cette prise en charge couvre également les aspects médicale et psychosociale. Sur ce plan des dispositions règlementaires existent ; nous pouvons citer la gratuité des soins et des analyses consacrées par la loi portant prévention et répression des violences faites aux femmes et la création des CIPEC pour une prise en charge intégrée. Cependant, le parcours d’accès des victimes aux soins continue de souffrir de nombreuses entraves »
Extrait de l’arrêté inter ministériel
Article 2
Le coût du certificat médical est fixé à dix mille (10.000) francs CFA. Il est à la charge du Ministère de la Justice lorsque le médecin est réquisitionné par I ‘officier de police judicaire, le procureur ou le juge. Il est transmis au requérant sous pli fermé. En I ‘absence de toute réquisition, le certificat médical est payé par la victime et lui est remis en mains propres.
Article 3
Les victimes bénéficient de la gratuité de la délivrance du certificat médical suivant la procédure ci-après :
– lorsque les victimes s’adressent directement à un officier de police judicaire ou tout autre agent habilité par la loi qui les réfère à un médecin avec une réquisition, le médecin examine la victime et établit le certificat médical sur la base du modèle annexé au présent arrêté. Le certificat médical est transmis sous pli fermé à l’officier de police judicaire ou à tout autre requérant ;
– lorsque les victimes s’adressent directement à un médecin en raison de la gravité de leur état de santé, le médecin examine la victime et établit le certificat médical sur la base du modèle annexé au présent arrêté. Il oriente la victime vers un officier de police judicaire ou tout autre agent habilité par la loi qui leur délivre une réquisition pour le médecin. Le certificat médical est transmis sous pli fermé au requérant ;
– lorsque les victimes sont vues en première intention par un agent de la protection sociale ou toute autre personne de la chaine de répression et de réponses des violences basées sur le genre, elles sont orientées en fonction de leur état de santé soit vers un officier de police judicaire ou tout autre agent habilité par la loi qui leur délivre une réquisition pour un médecin soit vers un centre de santé habilité pour la prise en charge.
L’officier de police judicaire, le procureur ou le juge ayant réquisitionné accomplit les diligences nécessaires pour que le médecin soit payé.
Publié le 21-03-2023 dans UNFPA Bénin
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