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État des lieux de la PF en Guinée : vers une politique de gratuité

4 juin 2025

État des lieux de la PF en Guinée : vers une politique de gratuité

La Guinée n’a pas encore adopté de politique de gratuité des services de planification familiale. Ainsi, l’étude a évalué les conditions préalables à sa mise en œuvre, en examinant la disponibilité des ressources humaines et du plateau technique, l’offre de contraceptifs, la qualité des services et des soins.

Connaissances et attitudes en matière de PF

La connaissance des femmes sur la planification familiale est limitée, bien que leur satisfaction globale vis-à-vis des services soit élevée. Il ressort de l’étude que la plupart des femmes ont une faible connaissance des méthodes contraceptives (63,7 %) et des avantages de la PF pour la mère et l’enfant.

Quant aux hommes, la majorité (76,8 %) connaît l’existence des méthodes contraceptives, mais leur niveau de compréhension des différentes méthodes et de leur usage est faible (3,5 %). De nombreux hommes expriment des doutes sur les méthodes contraceptives (34,6 %) et un besoin d’informations supplémentaires (22,1 %). S’ils reconnaissent certains avantages de la PF, comme l’espacement des naissances (60,2 %) et la réduction des grossesses non désirées (36,2 %), leur connaissance des autres bénéfices reste limitée.

Offre de services de PF et adhésion des prestataires de soins

Les résultats ont montré que 100 % des formations sanitaires offrent au moins trois méthodes contraceptives modernes. La majorité des prestataires de santé interrogés offre des services de PF et de counselling (99,4 %). Ce niveau élevé d’engagement montre l’importance que le système de santé guinéen accorde à la promotion de la santé reproductive. La disponibilité et l’accès aux services sont relativement bons, permettant aux patients de mieux comprendre les méthodes contraceptives et de faire des choix éclairés.

Cependant, un grand nombre de prestataires impose des restrictions à l’accès aux méthodes contraceptives à travers la fixation d’un âge limite (86,3 %), d’un nombre minimum d’enfants, du consentement du partenaire requis (55,6 %), ainsi que de la situation matrimoniale (13,8 %). Ces restrictions peuvent limiter l’accès des femmes aux méthodes contraceptives adaptées à leurs besoins.

« C’est une opportunité pour étendre l’offre et l’utilisation des méthodes de PF, en particulier pour les adolescents et les jeunes, et aussi pour combler les besoins non satisfaits des femmes en âge de procréer. » (GN, EI, informateur 4, PTF)

Perceptions sur les campagnes nationales de gratuité

En Guinée, il n’existe pas de politique de gratuité totale de la planification familiale à l’échelle nationale. Néanmoins, des campagnes ponctuelles de gratuité sont organisées une fois par an par le ministère de la Santé et de l’Hygiène publique. Même si certains émettent des réserves sur la durabilité et la soutenabilité, la plupart des répondants sont unanimes quant à leur impact sur l’utilisation des services de PF et plaident pour une gratuité totale et pérenne.

Les conditions de base pour la gratuité de la PF dans les formations sanitaires

En termes d’infrastructures sanitaires, il a été observé que :

  • Plus de 95 % des formations sanitaires protégeaient leurs produits contre la pluie, 96,9 % les plaçaient sur des étagères et non sur le sol, et 95,3 % les conservaient dans des endroits secs et frais.

  • 40,6 % des structures de santé ne disposaient pas d’une salle d’attente équipée de sièges et protégée du soleil et de la pluie pour les clientes ;

  • 67,2 % possédaient une salle d’examen séparée, sans visibilité vers l’extérieur ;

  • 53,1 % disposaient d’une source d’eau potable (robinet).

Dans l’ensemble, les formations sanitaires disposaient d’un plateau technique à renforcer pour l’offre de services de PF. Les matériels/équipements les plus disponibles étaient les conteneurs d’écouvillons stériles (42,2 %). À l’opposé, le crochet tubaire a été observé dans seulement 17,2 % des formations sanitaires.

Concernant la disponibilité des produits contraceptifs, il a été observé que :

  • 100 % des formations sanitaires offraient au moins trois méthodes contraceptives modernes ;

  • Moins d’un quart (23,4 %) des structures de santé offraient des méthodes à longue durée d’action ;

  • Aucune formation sanitaire n’offrait la totalité des méthodes contraceptives modernes aux clients ;

  • 60,9 % des formations sanitaires ont connu une rupture d’une méthode moderne au cours des trois derniers mois ;

  • 12,5 % ont enregistré la rupture d’au moins trois méthodes modernes sur cette période ;

  • 45,3 % ont connu une rupture d’au moins une méthode moderne à longue durée d’action ;

  • 41 % des ruptures enregistrées ont duré plus de sept jours.

La qualité des services, évaluée à partir d’une observation directe, a indiqué différents niveaux. Pour 40,4% des consultations le score indiquait que l'accueil et les relations interpersonnelles étaient de bonne qualité, 73,4% pour l’interrogatoire, 35,7% pour une nouvelle méthode ou changement de méthode contraceptive et de 2,9% pour l’examen clinique. 

Opinions sur la mise en œuvre d’une politique de gratuité

Les entretiens ont révélé diverses opinions :

  • Une gratuité totale pour toutes les femmes, pour des raisons d’équité, afin de lever les barrières financières et de renforcer le système de santé.

« Je suis pour la gratuité totale, pas partielle, sinon il y aura une discrimination parce qu’il faudra avoir à ce moment des critères pour dire qui doit et qui ne doit pas payer. Je suis partant en ce sens, parce que nous voulons l’espacement des naissances, la réduction du taux de mortalité lié aux accouchements et autres, la mortalité néonatale. Nous ne voulons pas que les femmes tombent enceintes sans leur consentement. » (GN, EI, informateur 1, niveau régional)

  • Une gratuité limitée aux femmes multipares et allaitantes :

« Je pense que ce n’est pas à donner à toutes les femmes. Je pense que c’est à donner aux femmes allaitantes qui ont des petits enfants, et non à celles qui n’ont pas d’enfant. » (GN, FG, homme, 25–49 ans)

  • Une gratuité excluant les femmes ayant les moyens financiers.

Catalyseurs et barrières

Il existe plusieurs catalyseurs qui favorisent l’acceptation et l’utilisation de la PF. Le niveau d’instruction joue un rôle crucial. Certains hommes instruits comprennent l’importance de la PF pour la stabilité économique de leur famille. La PF est également perçue comme un levier de développement, permettant aux familles de mieux structurer leur avenir et d’assurer la santé des enfants.

En Guinée, la PF est confrontée à de nombreux obstacles, parmi lesquels figurent les barrières culturelles et religieuses, l’accessibilité, ainsi que le coût des produits, des intrants et des services. La sensibilisation insuffisante, la stigmatisation, l’analphabétisme et le déficit de personnel qualifié sont autant de facteurs aggravant ces défis. La barrière financière constitue également un frein majeur, surtout pour les femmes en zone rurale.

« Bon, ce qui me motive dans tout ça, c’est que la planification est une pratique qui nous permet de planifier nos actions de développement. Aujourd’hui, quand tu veux parler de l’être humain, ça passe par la planification familiale aussi, car des enfants bien portants facilitent le développement de la localité. Lorsque tu as des enfants qui ne sont pas malades, ça te permet d’aller travailler tranquillement. » (GN, EI, leader religieux 2, homme)

Cette fiche se veut un vecteur pour alimenter le processus de mise en place d’une politique de gratuité en Guinée. Elle éclaire la diversité des opinions, met l’accent sur le potentiel du système de santé à offrir la gratuité et identifie les aspects à améliorer. Les données probantes mises à disposition peuvent également servir tout processus de plaidoyer de haut niveau, qu’il soit conduit par le ministère de la Santé ou par la société civile.

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