Recherche : Améliorer la continuité de l’utilisation des méthodes contraceptives chez les femmes et les jeunes filles au Burkina Faso conduite par l’Institut Africain en Santé Publique au Burkina Faso
Background de la recherche
L’Objectif principal de la recherche était de mesurer l’incidence de la discontinuité de l’utilisation des méthodes contraceptives modernes, identifier et analyser les facteurs et les raisons liés à cette discontinuation.
L’équipe a utilisé une méthode mixte avec une approche quantitative et qualitative complémentaires et imbriquées. Une cohorte de nouvelles utilisatrices PF a été suivie pendant un an ; la fréquence du suivi dépendant de la méthode utilisée. Des entretiens individuels approfondis et/ou des discussions de groupes ont été réalisés avec les femmes qui ont discontinué et celles qui ont continué les méthodes, avec les gestionnaires et les prestataires de services de soins de santé ainsi que les personnes influentes et/oules détenteurs d’enjeux en communauté. Les logiciels Stat et Nvivo 14 ont été utilisés respectivement pour l’analyse des données quantitatives et qualitatives.
Principaux résultats
Description de la population d’étude
De janvier 2024 à Janvier 2025, l’équipe de recherche a :
- Suivi une cohorte de 806 utilisatrices de contraception dont 41,8% âgées de moins de 24 ans, et 38,6% vivant en milieu rural. Elles utilisaient les contraceptifs injectables (46,6%), l’implant (32,5%), les contraceptifs oraux (13,4%) et le DIU (6,2$).
- Réalisé 159 entretiens et discussions de groupe avec les utilisatrices, leur conjoint, les prestataires de santé et gestionnaires de programme.
Incidence de la discontinuité
Durant la période de suivi :
- 45,1% de la cohorte ont arrêté l’utilisation de la contraception. Sur cette proportion, 43,7% étaient des jeunes (15-24 ans) ; et 47% vivaient en milieu rural.
- Considérant le total d’utilisatrices par méthode, 73,1% des utilisatrices des contraceptifs oraux ont discontinué. Cette proportion est de 60,4% pour les injectables, 16,7% pour le DIU et 15,1% pour l’implant.
- La tendance de la continuité était significativement liée au nombre de grossesses antérieures (les nulligestes ont plus rapidement discontinué par rapport aux paucigestes et multigestes), le nombre d’enfants, l’âge du dernier enfant (les femmes dont le dernier enfant à plus de 2 ans ont plus discontinué) mais pas au niveau d’éducation ni à l’acceptabilité de la PF par le conjoint et la communauté.
« L’injectable, si tu utilises cela pendant longtemps, tu peux chercher une grossesse pendant un an qui ne viendra pas, voire 2 ans même. Ce que j'ai vécu comme expérience avec cette méthode est que j'ai pris une grossesse qui a coulé. Si ce n’est pas que le gaz des produits est sorti (de ton corps), ce n’est pas possible d'avoir une grossesse qui va tenir. »
(BF, Discontinuante, 25 ans, Rural, V2) ; récit d’une nulligeste.
- Les utilisatrices des méthodes de courte durée d’action ont plus tendance à discontinuer comparativement à celles qui utilisent les méthodes à longue
- Enfin, les femmes ayant reconnu avoir plus d’autonomie de décision ou qui participaient à la prise de décision ont plus rapidement discontinué par rapport aux femmes non autonomes.
Facteurs de discontinuation observés
Les principaux facteurs de discontinuation observés sont :
- L’âge du conjoint/partenaire supérieur ou égal à 50 ans augmentait le risque de discontinuité de l’utilisation de la PF par la femme
- Plus une femme a un nombre élevé d’enfants vivants, moins elle était à risque de discontinuer l’utilisation de la méthode contraceptive
- Les femmes qui ont un niveau de connaissance élevé sur les méthodes contraceptives avaient moins de risque de discontinuer leur utilisation
- Les femmes qui ont choisi une méthode sous l’influence d’un proche étaient plus à risque de discontinuer comparativement à celle qui ont adopté leur méthode de préférence
- Les femmes qui partageaient le pouvoir de décision d’utilisation des méthodes contraceptives avec leur partenaire étaient plus à risque de discontinuer l’utilisation comparativement aux femmes complètement non autonomes.
Raisons de discontinuation évoquées
Les raisons de discontinuation sont largement dominées par les effets secondaires (44%). Ensuite, certaines femmes ont évoqué le manque de temps pour aller dans la formation sanitaire (13,5%), l’opposition du partenaire (8%), le désir de grossesse (7,2%) et l’oubli de la prise (5,2%).
« Si une femme décide d'arrêter, c'est qu'elle a vécu une mauvaise expérience de la méthode »
(BF, Discontinuante, 28 ans, Urbain, V2).
« Parce que là il y a des méthodes qui diffèrent selon les organismes, selon les femmes. Voilà selon le mental de chaque femme aussi, donc tu ne peux pas dire typiquement, c’est telle méthode qui domine voilà c’est ça qui est un peu le hic. »
(BF, Gestionnaires, 52 ans, Rural) ; récit d’un gestionnaire sur l’ampleur des effets secondaires par méthode.
Autres analyses : Accessibilité et Autonomie de décision
L’accessibilité a été analysée sous les dimensions d’accessibilité géographique, financière et d’acceptabilité :
- Distance moyenne entre le domicile et la formation sanitaire : 4,9 Km ;
- Dépense moyenne par femme : 379 XOF en transport et 245 XOF pour les produits ;
- 72,1% des conjoints acceptent la PF
Près de la moitié des femmes (46,2%) ont déclaré avoir une autonomie de prise de décision d’utilisation des services PF. Il n’y a pas de différence selon l’âge.
Recommandations pour améliorer la continuité contraceptive
Le plan d’action issu de la restitution des résultats au niveau national et régional recommande, entre autres, la mise en place d’un système de suivi de l’utilisation continue avec des indicateurs pertinents, l’effectivité de la délégation de tâche l’amélioration de la qualité des services, des compétences des prestataires, de l’information et la communication avec la communauté.