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La planification familiale : un solide pilier de l’économie familiale en Côte d’Ivoire

13 décembre 2022

En Côte d’Ivoire, la prévalence de la contraception moderne est de 22,5 % pour l’ensemble des femmes et 14 % chez les adolescents et jeunes (18-24 ans) sexuellement actives (enquête menée depuis juillet 2019). L’absence d’un cadre législatif spécifique, le manque de financement des produits contraceptifs, les ruptures de stocks constituent encore de nombreuses barrières à l’accès à l’information et aux services de planification familiale, une situation qui n’arrive pas à consolider l’économie familiale et le bien-être des couples.

Affoussata Fofana vit à Anyama, dans la périphérie d’Abidjan, la capitale ivoirienne. Elle y travaille comme assistance de direction dans une entreprise. À 31 ans, elle est mariée et mère de deux enfants. Affoussata a contracté sa première grossesse à 24 ans alors qu’elle venait tout fraîchement d’obtenir son Brevet de Technicien Supérieure en ressources humaines. Elle arrête les études et décide de se lancer sur le marché de l’emploi.

« Je n’avais pas de choix avec un enfant en charge. J’aurais aimé poursuivre les études supérieures mais c’était difficile. Je me suis mariée aussitôt et, après plusieurs années de stage, j’ai pu obtenir un emploi d’assistante de direction », raconte-t-elle.

Aujourd’hui, le travail d’Affoussata lui permet de participer aux charges du ménage : scolariser les enfants, les nourrir, les soigner. Elle aimerait aussi réussir à faire des économies pour financer une activité de vente de pagnes. Or avec une famille très nombreuse, cet objectif serait difficile à atteindre faute de temps pour exercer cette activité. Ainsi, son époux et elle ont décidé d’espacer les naissances depuis la première grossesse. « J’étais encore au collège quand j’entendais parler pour la première fois de planification familiale lors des séances de sensibilisations dans les écoles. Aujourd’hui, je l’expérimente et cela m’est bénéfique en tant que jeune femme. Dès la naissance de mon premier fils, qui a aujourd’hui 07 ans, mon mari et moi avons opté pour la pilule. J’achète la boite de trois plaquette de pilules à environ 500 francs CFA en pharmacie. Cela me convient ». L’époux de la jeune dame fait partie des hommes qui pensent que la planification familiale n’est pas un sujet tabou et militent pour sa promotion.

Sylla Moussa, 37 ans, a plusieurs fois accompagné son épouse à l’hôpital pour prendre conseil sur les sujets relatifs à la santé sexuelle et reproductive. Selon lui, la planification familiale permet, aujourd’hui, « d’économiser, d’organiser leur budget pour mieux s’occuper de leurs deux enfants ». Pour choisir le moyen de contraception qui lui convient le mieux, Affoussata a consulté une professionnelle de santé qui travaille pour l’association internationale pour le bien-être familial à l’hôpital général d’Anyama. La plupart d’entre elles sont sage-femmes, infirmières ou auxiliaires de santé. En complément de leurs activités de soins généraux, elles travaillent avec l’Association Ivoirienne pour le Bien-Etre familiale (AIBEF) qui les forme au planning familial. Même si Affoussata et Moussa sont des ambassadeurs de la planification familiale, beaucoup de jeunes restent encore piégés par l’ignorance sur la sexualité.

Le combat est loin d’être gagné

En Côte d’Ivoire, le taux de prévalence contraceptive moderne est de 22,5 % pour l’ensemble des femmes, selon une enquête menée par l’Ecole nationale supérieure de statistique et d’économie appliquée dans le cadre du projet « Performance monitoring for Action » en juillet 2019. Près d’une adolescente sur trois a des représentations sociales négatives vis-à-vis de l’utilisation de la PF chez les jeunes filles, considérant que les jeunes filles qui utilisent la PF ont des mœurs légères ou que la PF concerne uniquement les femmes qui ne veulent plus avoir d’enfants.

Ces résultats dénotent des préjugés qui pèsent encore au sein des communautés jeunes. Face à ce tableau peu reluisant, la Côte d’Ivoire, dans son Plan d’Action National Budgétisé (PANB) de Planification Familiale 2021-2025, s’est fixée comme objectif de faire passer la prévalence contraceptive moderne chez toutes les femmes en âge de procréer à un taux minimum de 36 % et à veiller à ce qu’au moins 15% des activités financées du Plan de PF soient dédiées à la prise en charge des besoins des jeunes, conformément à la déclaration des jeunes du Partenariat de Ouagadougou et aux engagements nationaux pris dans le cadre du PO et du programme Family Planning 2020.

Pour y parvenir, le Programme National de Santé Mère Enfant (PNSME) a pris des engagements pour la gratuité et la disponibilité des produits contraceptifs. « Il faut que cette gratuité soit étendue sur tout le territoire avec un accent particulier sur toute femme en âge de procréer y compris les jeunes et les adolescentes », préconise Dr Tanoh Gnou, le Directeur Coordonnateur du Programme National de Santé Mère Enfant (PNSME) qui plaide aussi pour que la Côte d’Ivoire ait une loi sur la santé de la reproduction.

Pourquoi la planification familiale est un outil de développement socio-économique à prendre au sérieux

La planification familiale est considérée comme un objectif du développement durable (ODD3). Selon Family Planning 2020, les objectifs du développement durable se retrouvent tous liés d’une manière ou d’une autre à l’enjeu de la planification familiale. Par exemple, une utilisation accrue de la PF pourrait, en moyenne, réduire l’insécurité alimentaire par 21 %, la mortalité maternelle de 25 %. Elle pourrait également augmenter le taux de croissance du PIB de 0,6 points.

De l’économie à l’environnement, en passant par la santé, la planification familiale a un impact sur ces leviers de développement. Elle demeure une nécessité à prendre en compte dans les programmes de développement, notamment dans les pays en développement comme la Côte d’Ivoire.

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