L’accès aux soins de santé sexuelle et reproductive est un droit fondamental pour tous. Ceci indépendamment du statut physique ou mental. Cependant, en Afrique, l’accès à ces droits reste souvent limité pour les personnes handicapées. Le Bénin ne fait pas exception à cette triste réalité . l’Afrique compte de nos jours une population importante de personnes handicapées avec des estimations allant jusqu’à 80 millions de personnes. Ces handicaps peuvent être physiques, sensoriels, intellectuels ou psychosociaux.

Pour la plupart des cas, l’origine de ces handicaps est souvent liée à des conditions de vie difficiles et à l’accès limité à l’éducation mais surtout aux soins ou manque de soin de santé. Les stigmatisations culturelles profondément enracinées dans les sociétés africaines peuvent également faire partie des causes du rejet de ces handicapés.

Pire, Ces personnes en situations de handicap sont souvent confrontées à des barrières multiples lorsqu’il s’agit d’accéder à la santé sexuelle et reproductive. L’accès se justifie et s’observe à tous les niveaux. C’est que nous dit Borgui Orou Wari, Assistant social au centre de promotion social de Tchaourou et responsable du service de la prise en charge de personnes handicapées et du troisième âge.

Propos recueillis par : Fachari ABOUDOU

L’éducation sexuelle en Afrique est souvent limitée et très peu accessible aux personnes handicapées. Comme l’évoque la majorité des personnes handicapées, leur parent ne leur donnent aucune information et ne mènent aucune discussion liée à leur sexualité. A l’école et également dans les centres de santé, les programmes éducatifs ne sont pas adaptés à leurs besoins spécifiques, ce qui peut entraîner un manque de compréhension des questions liées à la santé sexuelle.

L’accès au centre : Un calvaire indescriptible

Les installations de santé au Bénin ne sont souvent pas adaptées aux besoins des personnes handicapées. Les rampes d’accès, les toilettes adaptées et autres aménagements particuliers ne sont pas courants, ou n’existent quasiment pas. Ce qui rend difficile pour les personnes handicapées de se rendre dans les établissements de santé. « Toutes les fois que je tombe malade et que je vais devoir me rendre à l’hôpital, c’est un problème pour moi car il me faut négocier pour qu’on m’y conduise. Malgré cela, je suis déjà tombé à plusieurs reprises parce que je rate les escaliers ou des fois je sens que l’hôpital est dans un trou. Donc il faut descendre. Ce qui fait que je glisse ou je trébuche malgré la présence de mon accompagnateur » Explique Mohamed Djibril, Handicapé visuel résidant à Parakou au nord du Bénin.

Pour Aboudou Barikissou, handicapé moteur toutes les fois où elle doit se rendre à l’Association Béninoise pour la Promotion de la Famille (ABPF) de Parakou, elle sent son intimité violée. D’abord elle affirme qu’elle doit être accompagnée par une personne qui va le guider en raison des escaliers multiples qui s’y trouve. Ensuite elle n’arrive pas à communiquer avec les agents qui y travaillent en raison de son niveau très bas en français.

Des réalités à corriger

Le Bénin ne fait pas exception en ce qui concerne les défis auxquels sont confrontées les personnes handicapées en matière de santé sexuelle. D’ailleurs il fait partie des pays où il faut plus redoubler d’ardeur et d’effort pour une vie sexuelle épanouie des personnes handicapées. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le pays compte environ 7% de personnes handicapées parmi sa population totale. Cela représente une proportion significative de la population qui peut être confrontée à des obstacles pour accéder à des services de santé sexuelle. Ainsi pour qu’une si grande partie de la population ne soit mis à l’écart, il faille trouver des solutions et piste de solutions adaptées aux besoins spécifiques des personnes handicapées. Selon une enquête menée par Handicap International en 2018, seulement 17% des personnes handicapées interrogées au Bénin ont déclaré avoir accès à des services de santé sexuelle adaptés à leurs besoins.

Hormis les problèmes liés à l’accès, la stigmatisation et la discrimination restent des problèmes majeurs pour les personnes handicapées dans les régions du nord du pays. Selon une étude de l’Union Nationale des Associations des Personnes Handicapées du Bénin (UNAPHB), près de 80% des personnes handicapées interrogées ont déclaré avoir été victimes de discrimination en raison de leur handicap.

L’éducation sexuelle chez les personnes handicapées

Le manque d’éducation sexuelle adaptée aux personnes handicapées est également préoccupant. Selon l’enquête de Handicap International de 2018 au Bénin, moins de 10% des personnes handicapées interrogées au Bénin avaient reçu une éducation sexuelle appropriée. Les femmes handicapées au Bénin sont particulièrement vulnérables aux grossesses non désirées en raison du manque d’accès à l’information sur la contraception et des pressions sociales pour avoir des enfants. La même enquête nous révèle que seulement 6% des femmes handicapées au Bénin ont déclaré avoir accès à des services de contraception. Pourtant ces femmes sont pour la plupart du temps joués et trahis par certains hommes qui ne s’intéressent à eux que pour le sexe.

Ecoutons Mounirou Lafia, Président du Réseau des Associations des personnes Handicapées du Borgou pour un témoignage qui corrobore cette idée.

Les Initiatives salutaires

Plusieurs Organisations Non Gouvernementales (ONG) au Bénin travaillent à sensibiliser la population et à fournir une éducation sexuelle adaptée aux personnes handicapées. Ces programmes visent à briser les stéréotypes et à renforcer la confiance en soi des personnes handicapées. Hormis ces ONG, l’Association Béninoise pour la Promotion de la Famille (ABPF) travaille dans ce sens depuis de nombreuses années. C’est ce que nous a confié Mounirou Lafia, Président du Réseau des Associations des personnes Handicapées du Borgou pendant nos échanges.

Certains établissements de santé au Bénin ont entrepris des rénovations pour rendre leurs installations accessibles aux personnes handicapées. Cela inclut la création de rampes d’accès, de toilettes adaptées et de services de conseil spécifiques aux besoins des personnes handicapées. Le Bénin a adopté des lois visant à protéger les droits des personnes handicapées, y compris leur droit à la santé sexuelle et reproductive. Cependant, la mise en œuvre effective de ces lois reste un défi. Il est essentiel que les gouvernements, les ONG et la société civile continuent à travailler ensemble pour garantir que toutes les personnes, indépendamment de leur handicap, puissent exercer leurs droits en matière de santé sexuelle et reproductive. Cela nécessite un engagement à long terme pour briser les barrières qui entravent actuellement l’accès de ces services.

Publié le 28-09-2023 dans Irogni ojùmon