A quelques semaines de la Réunion Annuelle du Partenariat de Ouagadougou qui se tiendra du 11 au 13 décembre à Abidjan, la Directrice de l’Unité de Coordination du Partenariat de Ouagadougou (UCPO), Marie Ba, lève le coin du voile sur les succès et défis du Partenariat de Ouagadougou (PO), 12 ans après. Cette jeune dame, voix puissante du bien être des communautés ouest-africaines, particulièrement des femmes et des jeunes filles dégage une grande passion pour la cause qu’elle défend. Elle s’est livrée à nos questions pour partager avec nous ce voyage autour du partenariat.
Aissatou Thioye: La première question, le PO 12 ans après?
Marie Ba: Oui, alors le PO 12 ans après, c’est une initiative dont nous sommes toujours très fiers, parce que justement nous avons réussi pendant ces 12 ans et je pense que le succès n’était pas évident à son entame. Dans ce domaine, en général, l’Afrique de l’Ouest francophone surtout, n’est pas forcément la mieux positionnée, mais je pense que nous avons eu les ressources qu’il fallait et surtout le soutien qu’il fallait.
“On me demande souvent quelle est la recette du succès du partenariat, mais pour moi c’est en grande partie le secrétariat, d’avoir alloué les ressources nécessaires pour ce secrétariat-là et pour animer le partenariat, pour qu’il assure ensuite les différentes réalisations. Je pense que c’est d’avoir su fédérer autour d’un indicateur commun, d’avoir des acteurs, les différentes parties prenantes, qui ont vraiment cru en ce partenariat-là.” —Marie Ba |
Aissatou : Les succès du PO, à travers l’UCPO et ses partenaires?
Marie : Encore une fois, l’UCPO, toute seule, ne peut pas atteindre ses objectifs. Quand nous parlons de succès, je dis toujours, ce ne sont pas les succès de l’UCPO, ce sont ceux du Partenariat de Ouagadougou. Et donc d’avoir pu fédérer toutes ces parties prenantes là autour du partenariat de Ouagadougou qui y ont cru et que les résultats de chacun aient pu contribuer et qu’on ait pu magnifier ces résultats là. 12 ans après, c’est encore beaucoup de défis dans la sous-région. Je pense qu’ en termes de région, nous avons eu beaucoup de contributions sur les taux de prévalence contraceptive, sur le nombre d’utilisatrices additionnels, sur la qualité des services, des données et des produits. Mais il y a encore, évidemment, dans tous ces domaines-là, beaucoup de choses à faire.
“Donc nous sommes très fiers, que ce soit pour des Africains, par des Africains, qui comprennent le contexte, parce que c’est illusoire de vouloir importer un modèle d’une région à une autre, d’un pays à un autre, même entre les pays du partenariat de Ouagadougou.” —Marie Ba |
Vous avez un pays comme le Niger, un pays comme la Côte d’Ivoire, sont à deux extrêmes en termes de valeurs, d’indicateurs, de normes sociales…. Et d’avoir su justement concilier, non seulement les différences, mais aussi tout ce qui nous regroupe et les commonalités que nous avons entre les neuf pays, c’est important.
Aissatou : Vous avez parlé tout à l’heure de succès par rapport aux partenariats, pouvez-vous nous en donner quelques-uns qui vous ont vraiment marqué autour de ce partenariat?
Marie : D’un, en termes de partenariat, une chose dont nous sommes particulièrement fiers, c’est la discussion même autour de la planification familiale, de la contraception qui a beaucoup évolué, qui a beaucoup changé. C’est le fait d’avoir pu insuffler cette collaboration régionale mais de voir aussi ce qui se fait au niveau international. C’est très important d’avoir vraiment gardé les yeux ouverts sur ce qui se passe au niveau global et ensuite d’avoir pu l’adapter à notre région et par rapport à nos besoins.
Je pense que l’évolution dans la discussion autour de la planification familiale, c’est une excellente chose. Deux, c’est d’avoir pu et d’avoir su de plus en plus, même s’il y a encore du chemin à faire, intégrer les jeunes et leurs besoins dans ce partenariat de Ouagadougou et d’avoir su renouveler au bon moment les différentes parties prenantes qui sont autour du partenariat. Dans une région où il y a à peu près 60% des jeunes qui ont moins de 24 ans, c’est d’avoir fait en sorte que ces derniers puissent se retrouver dans ce partenariat-là et ne pas devenir obsolète. Donc, l’inclusion et l’intégration des jeunes, de leur préoccupation dans ce partenariat, et le focus que nous avons sur eux, non seulement en tant que bénéficiaires, mais en tant qu’agents de changement, c’est une grande fierté.
En termes de résultats aussi, le nombre d’utilisatrices additionnelles, ça peut avoir l’air très bénin quand nous disons un million d’utilisatrices additionnelles, mais il faut savoir que pour la plupart des pays, c’est d’avoir vraiment cherché l’équité par rapport aux neuf pays. C’est-à-dire, ce qui nous intéresse, ce n’est pas que nous ayons atteint notre objectif annuel, nous l’avons atteint et nous sommes passés à autre chose. Mais, nous nous assurons que chacun des neuf pays atteigne son objectif chaque année. Par exemple, il y a le Mali qui, pendant, près de sept à huit ans, n’a jamais pu atteindre son objectif à cause de beaucoup de circonstances.
Et je pense qu’en fait, avec tous les efforts qui ont été faits, le focus qui a été mis sur le Mali, le financement qui a augmenté, ils ont réussi, à partir de l’année 2018-2019, à rattraper tout le gap qu’ils avaient eu et maintenant d’être un pays qui, de façon constante, arrive à non seulement atteindre, mais aussi dépasser ses objectifs. Et ça, je pense que c’est un énorme succès pour le Mali, et pour tous les partenaires qui ont œuvré à ça, de s’assurer justement que ce pays qui n’arrivait pas à atteindre ses objectifs maintenant arrive à le faire de façon consistante. Et nous aimerions pouvoir le faire pour d’autres pays aussi qui ont encore quelques lacunes dans l’atteinte de ces objectifs. Je pense que ces augmentations en termes d’indicateurs, surtout du taux de prévalence contraceptive, de pouvoir répondre à la demande, à un moment, seront aussi les prochains défis. Et, pouvoir créer cette demande et l’augmenter, c’est une excellente chose. Mais, il y a encore des besoins non satisfaits que nous aimerions combler.
Aissatou : Quels sont maintenant les défis/challenges, surtout par rapport aux objectifs 2030?
Marie: Je pense que ce n’est jamais facile quand on fait de la coordination de pouvoir fédérer tout le monde.
“Il y a toujours des avis très divergents selon la culture, selon l’éducation, selon les perspectives. Donc, parfois, c’est vrai que c’est un challenge, en tout cas pour l’unité de coordination, de pouvoir fédérer autour de certaines idées. Nous aimerions pouvoir être précurseurs autant que possible, mais nous sommes obligés aussi de suivre les désirs des pays parce que nous sommes là pour ça, nous sommes là pour leurs besoins, pour pouvoir les combler et pas forcément aller trop en avant.” —Marie Ba |
Mais nous aimerions pouvoir continuer à être une locomotive justement sur certains aspects par rapport à la santé de la reproduction et la planification familiale. Donc, il y a beaucoup de diplomatie qui entre en jeu. C’est fascinant, c’est très intéressant, mais ça peut être aussi un gros défi. Sur les années à venir, c’est quelque chose à laquelle nous prêtons très attention, c’est de ne jamais aller trop vite ou trop lentement, c’est de trouver le bon rythme. Les autres défis aussi, je pense que par rapport à l’intégration des jeunes, il y a encore beaucoup que nous devrions pouvoir faire. Pour nous, en tant que l’unité de coordination et pas partenaire de mise en œuvre, nous ne voulons pas nous substituer justement aux partenaires de mise en œuvre.
Parfois, c’est un peu la perception, mais nous voulons vraiment rester dans la coordination et pouvoir insuffler justement aux partenaires de pouvoir augmenter l’employabilité des jeunes, comment avoir des militants et des jeunes de manière encore plus inclusive et ratisser le plus large possible, que nous ne nous adressons pas toujours à la même cible. Et ça, c’est un challenge ces dernières années, je pense sur l’année 2022 et 2021. Et l’un des avantages du Covid, c’est que ça nous a obligés à être dans les plateformes digitales. Nous avons pu quand même atteindre des personnes, des entités, des structures qui n’étaient pas forcément des cibles, qui ont des opinions différentes, qui ont des façons de voir différentes, qui étaient de régions différentes, avoir encore plus d’inclusivité par rapport au mouvement. C’est l’un des challenges que nous avons encore et puis après, il y a toutes les barrières socio-culturelles. Quand nous voulons créer de la demande parce que nous avons atteint nos objectifs et nous sommes encore plus ambitieux, ça veut dire forcément qu’il va falloir susciter justement l’attention, l’intérêt mais c’est toujours en gardant à l’esprit que ce ne sera que si c’est réellement un besoin pour les femmes.
Et c’est ce que nous avons entendu. C’est de ne pas forcer justement ces méthodes ou cette façon de penser aux femmes de la région; si elles en ont besoin, de pouvoir créer cette demande et si elles y répondent à ce moment-là, de pouvoir couvrir leurs besoins.
Aissatou : Quels sont les leviers sur lesquels l’UCPO compte s’appuyer pour favoriser le financement des organisations de jeunes engagés dans la PF/SR?
Marie : Alors comme je disais, nous voulons beaucoup jouer sur leur employabilité. Ce dont nous nous sommes rendu compte quand nous faisions la stratégie jeunes du PO, c’est que beaucoup de jeunes étaient dans la sous-région, travaillaient avec les partenaires, mais ça s’arrêtait à un certain stade. C’est-à-dire, ils allaient dans des conférences, ils apprenaient autant que possible, parfois il y avait des formations, mais après, au moment où ils devaient rentrer dans la vie active, nous les perdons parce qu’ils leur faut un revenu, et ce n’est pas possible de les garder dans le volontariat.
Je pense qu’un shift que nous avons beaucoup effectué au niveau de l’UCPO, c’est vraiment d’insister que leur travail devrait être rémunéré, à hauteur de leur compétence et de leur connaissance. Et au niveau de l’unité de coordination, nous avons commencé à recruter des youth leads qui sont rémunérés avec l’Assurance Maladie et tout le package qui va avec. Nous pensons que ça aussi c’est important. Mais c’est aussi d’influencer autant que possible les partenaires à en faire d’eux-mêmes. Comme je l’ai dit, nous ne pouvons pas être dans une région où nous voulons ou nous prétendons soutenir les jeunes, que nous leur donnons des formations mais ensuite, que nous ne les jugeons pas capables eux de pouvoir intégrer nos institutions et nos organisations, et de travailler sur leur employabilité, ça c’est un des points. Un autre point, je pense qu’une des barrières qu’on a beaucoup entendu, c’est le problème de financement des associations et des organisations jeunes. Et, c’est une des raisons pour lesquelles ils n’arrivent pas à obtenir des financements directs. Ça passe parfois par la société civile, mais très souvent nous avons entendu, ils ne se retrouvent pas.
“Parce que nous les traitons comme des enfants, ils n’ont pas la latitude de leur mouvement comme ils voudraient. C’est vraiment de voir, et nous avons eu ces discussions là à un moment, s’il pourrait y avoir des agences fiduciaires pour ces organisations de jeunes qui eux ne seraient même pas dans la planification familiale. Et ça c’est vraiment une leçon apprise au niveau de l’UCPO. Quand votre host est dans le même domaine que vous, il y a tout de suite cette compétition qui se crée.” —Marie Ba |
Et c’est comment enlever justement cet esprit de compétition qui se crée parfois et de pouvoir leur avoir des agences fiduciaires qui ne sont là que pour s’assurer que les fonds sont utilisés à bon escient, pouvoir avoir les audits et que les bailleurs puissent avoir confiance, que les partenaires de mise en oeuvre puissent avoir confiance. Ce sont des conversations qu’on a commencé mais nous n’avons pas évolué autant que nous voudrions. En même temps, il devrait y avoir aussi le renforcement de capacités institutionnelles pour les organisations des jeunes, que ce soit en mobilisation de ressources mais pas que comme je dis, souvent ça ne sert à rien de savoir mobiliser des ressources si après, vous ne savez pas comment les appliquer, les dépenser et les intégrer.
L’idée, c’est de pouvoir renforcer leur capacité institutionnelle en gestion de fonds, gestion de programmes. Et à ce moment-là, c’est là que la confiance pourrait être établie. Nous avons souvent entendu leur cri de cœur, faites-nous confiance, faites-nous confiance. Comme je leur dis, les bailleurs et consorts sont tous redevables à leurs contribuables et on ne peut pas prendre de take chances. Donc il faut forcément qu’il y ait un certain travail qui soit fait. Aller au-delà des faites-nous confiance. A un moment, c’est de leur dire, ok mais, est-ce que vous pouvez vous asseoir, vous constituer en organisation? Qu’est-ce qui vous manque pour avoir un statut légal? Qu’est-ce qui vous manque pour…, etc.
Et donc il y a tout ce travail qu’ eux devront faire, parce que ce sera compliqué. Certains partenaires peuvent peut-être le faire, mais comme je dis, si jamais on veut prendre son destin en main, c’est de pouvoir arriver autour de la table avec une idée, de dire quels sont nos besoins. Donc, pouvoir s’enregistrer comme entité légale, pouvoir avoir justement le financier, le comptable qui va faire le suivi, comment on fait un audit et toutes ces questions-là, de comprendre que voilà leurs besoins, de voir qui pourrait financer ce renforcement institutionnel et ensuite coupler dans les premières années, on va dire, avec une agence fiduciaire qui les aiderait à gérer leur fonds. Mais après, il y a les programmes derrière, il y a les opérations. C’est vraiment très costaud et peut-être parfois, on ne s’en rend pas compte. Et ensuite, de pouvoir financer tout ça. Pour moi, ça va aussi dans l’employabilité. Je pense que le financement direct des organisations de jeunes, c’est vraiment un défi sur lequel l’UCPO, avec les partenaires, voudraient pouvoir mieux coordonner et collaborer.
Aissatou : On sait aussi que l’UCPO, ce n’est pas une organisation de mise en œuvre mais de coordination comme vous l’avez dit, donc à la base c’est la collaboration. Vous collaborez avec les parties prenantes dans la région. Quelle est la contribution du partenariat dans le succès du PO, aux côtés de l’UCPO?
Marie : Alors c’est différemment pour nous. Quand on liste les différentes parties prenantes, pour nous, il y a les bailleurs de fonds, il y a les représentants des gouvernements, la plupart du temps c’est le ministère de la Santé, la société civile et dans la société civile parce que nous avons voulu mettre le focus sur les jeunes et que nous avons un peu sorti de ce volet société civile, il y a les leaders religieux et les partenaires de mise en oeuvre.
Donc les interactions sont très différentes selon à qui nous nous adressons. C’est de pouvoir justement, nous allons dire façonner les interactions selon leurs besoins et nos besoins. On sait que nous avons besoin des partenaires de mise en œuvre parce que nous avons besoin de savoir ce qui se passe dans la sous-région. Eux ont besoin de visibilité parfois, ont besoin de crédibilité, nous en avons aussi besoin. Donc je pense que dans ces partenariats-là, c’est de savoir ce qu’ils font et de pouvoir remonter les informations que nous pouvons recouper par les partenaires de mise en œuvre et les représentants gouvernementaux. Et de pouvoir remonter ça au bailleur. Voici les défis auxquels sont confrontées les directions Santé Mères-Enfants, c’est un exemple concret, qui est revenu chaque année. Nous organisons une réunion avec les 9 directeurs santé mère-enfant qui se plaignaient souvent qu’ils n’ont pas la visibilité sur ce que les partenaires font sur le terrain.
Par exemple, un des Directeurs de la Santé Mère-Enfant qui vous dit, c’est quand le projet clôture, qu’on m’envoie une invitation pour me dire que le projet clôture, je ne savais pas que ce projet intervenait dans le pays, je ne connaissais pas leur zone géographique. Et c’est là qu’ils se rendent compte que certaines des interventions qu’ils faisaient sont très similaires à une autre qui est faite exactement dans la même région. Et c’est ce manque de coordination parfois, de pouvoir faire remonter ces informations au niveau des bailleurs qui pose problème. Attention, vous êtes en train de financer les mêmes programmes, parfois dans les mêmes pays, et qu’il faut vraiment qu’ils insistent eux, parce que c’est eux qui ont les financements, et c’est là d’où vient le pouvoir, d’insister auprès des partenaires de mise en œuvre, de toujours travailler sous le leadership du ministère de la Santé. Nous connaissons tous les problèmes structurels qu’il y a au niveau des ministères en termes de leadership ou quoi que ce soit, mais je pense que nous ne nous en sortirons vraiment pas si ce n’est pas fait sous leur leadership.
S’il faut renforcer leurs capacités, il n’y a pas de problème, mais il faut que les partenaires coordonnent. Donc ce sont ces remontées d’informations-là, je pense, ces différentes interactions que nous arrivons à avoir, et c’est là que le fait, pour l’unité de coordination, de rester le plus neutre possible. Parfois, ça nous a créé, nous allons dire, quelques désagréments mais la neutralité, c’est justement que nous arrivons à remonter, prendre les informations des partenaires de mise en oeuvre, qu’ils sachent que nous sommes là pour le bien de la région avec les représentants du gouvernement, avec les bailleurs, avec les jeunes et de pouvoir se dire certaines vérités quand il le faut et voir comment vraiment améliorer toute cette structure là, tout ce partenariat là.
“Je pense qu’une des raisons pour lesquelles le partenariat a pris, c’est qu’il y a la confiance avec les différentes parties prenantes, que l’objectif ultime, c’est vraiment le bien-être des femmes et des jeunes filles dans la sous-région.” —Marie Ba |
Et à partir de ce moment-là, quand vous avez cette même vision-là, c’est comment chacun contribue et après nous essayons d’emboîter les pièces autant que possible. Ce n’est pas parfait, mais je pense que c’est ce qui a vraiment fait l’apport de chacune des parties prenantes dans ce partenariat-là et comment garder l’intérêt de chacun d’entre eux, parce que parfois c’est aussi un des risques que nous courons quand nous avons un partenariat, c’est que vous avez des partenaires qui s’y intéressent jusqu’à un certain point, ensuite leur stratégie va changer par exemple et ils se détournent. Mais je pense qu’il y a quelque chose derrière, il y a une cause à laquelle il croit vraiment et c’est là que je dis, le soutien des bailleurs a vraiment été fondamental pour justement garder l’intérêt des différentes parties prenantes, sachant que voici l’initiative que les bailleurs soutiennent. Donc, si vous voulez des financements, si vous voulez du soutien technique, essayons de voir comment chacun contribue dans ce partenariat-là. Et ça, je pense que c’est ce qui a fait vraiment le fait que la machine prenne.
Aissatou : Décentralisation, équité, inclusion. Comment est-ce que ça vous parle? Et, au moment où on parle beaucoup de localisation de la santé, quel sera ou bien quel est le positionnement de l’UCPO par rapport à ça?
Marie : En termes de décentralisation, la chance que nous avons eu, c’est que dès le départ, nous avons mis en place comme je dis, une structure ouest africaine pour les femmes ouest africaines. Donc il y avait déjà cette idée de localisation. Il y a beaucoup d’autonomie que nous avons, moi je crois, par rapport aux bailleurs par exemple, où on ne dicte pas ce que nous avons à faire par rapport aux partenaires de mise en œuvre. Donc cette idée de délocalisation déjà et de décentralisation, elle est déjà dans l’essence même du partenariat de Ouagadougou.
L’équité, nous avons fait des efforts pour être très honnêtes. L’équité dans le partenariat, vous avez les neuf pays d’Afrique de l’Ouest francophone et vous avez les bailleurs. C’est vrai qu’il y a un moment, il y avait un petit déséquilibre par rapport aux bailleurs, parce que c’est eux qui ont le pouvoir, qui ont l’argent. Mais eux-mêmes ont reconnu qu’il fallait que nous puissions accorder plus de place aux pays dans ce partenariat-là.
Et c’est là qu’au-delà des PANB, nous avons commencé, dans les instances du partenariat, d’avoir par exemple plus de voix qui viennent de la société civile. Dans le conseil d’administration du partenariat de Ouagadougou, il y a une très bonne représentation des pays, de la société civile et des jeunes. C’était vraiment pour cette idée d’équité entre les bailleurs, entre les pays, qu’il n’y ait pas de déséquilibre.
“Ensuite, je pense que pour l’UCPO, moi en tant que femme africaine, c’est toujours très important de pouvoir donner la part aux femmes. Voilà, je veux dire en termes de minorité, femme, musulmane, africaine, francophone, je pense qu’on ne peut pas faire plus minoritaire que ça. Mais par exemple, nous avons eu il y a deux, trois ans à faire un shift justement où nous sommes passés du hosting par IntraHealth, qui est une organisation internationale, à Speak Up Africa, qui est une organisation locale. Et tout ça, c’était dans cet esprit de délocalisation et de pouvoir centraliser un peu plus au niveau de l’Afrique de l’Ouest. Donc ce sont deux entités qui sont dirigées par des femmes ouest-africaines qui comprennent le contexte. C’est dans ce sens-là que je pense que l’unité de coordination elle-même, dans son fonctionnement, dans ses opérations, c’est vraiment cette idée de décentralisation.” —Marie Ba |
C’était déjà, dès le départ, quand les gens me demandent parfois “mais comment avez-vous créé le projet?”, je dis “mais dès le départ, c’était déjà censé être un partenariat et pas un projet ?”.
Et c’est là, parce que pour moi, le projet, c’est déjà déséquilibré. Le projet, vous avez cette idée d’un bailleur qui finance et qui veut des résultats, qui a déterminé ses objectifs, ça peut être fait en tandem, mais ce sont quand même les résultats à rapporter au bailleur. Alors que le partenariat, tout a été défini ensemble. Et je pense que c’est là que nous avons vraiment cette idée d’inclusion et puis d’équité.
Aissatou : La prochaine RAPO se tient du 11 au 13 décembre à Abidjan. Que pouvez-vous nous en dire?
Marie : Chaque année, depuis le début du partenariat, c’est vraiment l’occasion de réunir toutes les parties prenantes autour de notre objectif commun, voir où nous en sommes et puis définir un thème qui, nous aimerions, reste dans les esprits pour toute l’année à venir, donc 2024. Et donc là, nous allons être sur le genre et la santé de la reproduction, mais vraiment avec un focus sur la jeunesse.
2023 en Côte d’Ivoire a été déclaré l’année de la jeunesse par le président Ouattara. Et donc ils avaient à cœur, quand nous leur avons demandé, et ça ce sont les neuf pays qui sont d’accord, ont décidé que la Côte d’Ivoire devrait prendre cette réunion annuelle. Et, les instructions que nous avons reçues et les orientations, c’était vraiment que nous puissions nous focaliser sur les jeunes. Ce qui va en droite ligne de toute façon avec nos stratégies. Donc voilà, nous sommes en train de construire l’agenda, d’être aussi inclusif que possible et d’avoir cette réunion-là dans les meilleures conditions du 11 au 13 décembre à Abidjan.
Publié le 16-11-2023 dans Knowledge Succes