A l’occasion de la Journée Internationale de la Femme 2018, l’Unité de Coordination du Partenariat de Ouagadougou (UCPO) en collaboration avec les Jeunes Ambassadeurs pour la Santé de la Reproduction et la Planification Familiale (JASR/PF) membres des Coalitions de la Société Civile pour le Repositionnement de la PF en Afrique de l’Ouest (CS4FP) vous propose une série d’interviews d’activistes urbaines et rurales œuvrant pour l’accès des femmes aux services de PF.
Madame ANANI Adjowa, âgée de 38 ans habite le village de Adabadji-kondji, dans le Canton de Yoto, à environ 150 km au nord-est de Lomé. Revendeuse et mère de quatre enfants, Adjowa est très reconnue dans son milieu pour son son altruisme et son engagement en faveur des droits de la femme en général et ceux relatifs à la santé de la reproduction en particulier. Devenue Agent de Santé Communautaire dans le district sanitaire de Yoto depuis près de 3 ans, Adjowa consacre bénévolement 2 jours par semaine à la sensibilisation des couples et des femmes des marchés sur les avantages de l’espacement des naissances et les consultations pré et post natales.
Comment est venu votre engagement au profit de la PF ? Qu’est-ce qui vous a poussé à vous engager ?
C’est à travers les différentes difficultés que rencontrent les femmes dans ma communauté, surtout les difficultés liées aux grossesses et à l’accouchement qui m’ont poussée à devenir une défenseuse des droits en matière de SR/PF et plus tard, agent de santé communautaire.
Nos maris ont démissionné de leurs responsabilités vis-à-vis de nous qui sommes leurs épouses et des enfants. Lorsque nous tombons enceintes nous sommes livrées à nous-mêmes, les consultations prénatales, les soins pendant la grossesse, la scolarité des enfants et d’autres besoins sont à la charge de la femme. Ce qui constitue pour nous un poids énorme. Certaines femmes lors de l’accouchement perdent la vie car n’ayant pas pu suivre les 4 consultations prénatales obligatoires avant l’accouchement, d’autres encore qui semblent avoir de la chance accouchent des mort-nés. Cela étant, l’arrivée du projet de distribution à base communautaire des méthodes de PF a été un atout énorme pour les femmes qui ont décidé d’adopter une méthode. Grâce à ce projet, j’ai renforcé mes connaissances sur les DSSR et la planification familiale et mon engagement s’accroît davantage.
En quoi votre activisme change ou pourrait changer la vie des femmes ?
Depuis que nous avons commencé à administrer les pilules, à faire des injections de depo- Provera, à distribuer les préservatifs, à faire des causeries et visites à domicile, en tant qu’Agents de Santé Communautaire (ASC), beaucoup de choses ont changé dans les familles et surtout chez les femmes qui ont accepté d’adopter une méthode contraceptive. Aujourd’hui toutes les femmes qui ont adopté une méthode de planification familiale sont contentes. Elles se sentent capables de pouvoir vaquer librement à leurs occupations. Elles, n’ont plus, à porter un enfant au dos bien qu’étant enceintes. Grâce aux méthodes, surtout à leur gratuité, beaucoup sont capables d’exercer des activités génératrices de revenus leur permettant de subvenir aux besoins vitaux de leurs familles.
Quels sont les défis auxquels vous êtes souvent confrontés ?
Depuis que nous avons commencé ce travail nous n’avons cessé de rencontrer des problèmes concernant les rumeurs sur les méthodes. Pour beaucoup de personnes, le Depo Provera est destiné aux animaux en Europe. D’autres encore stipulent que c’est des produits injectés aux femmes souffrantes de problèmes mentaux. Certaines disent que ces produits causent la stérilité et certains dysfonctionnements dans l’organisme. A ces rumeurs, nous essayons à chaque fois d’amener les gens à comprendre comment fonctionnent certaines méthodes une fois administrées. Nous exploitons notre boîte à images lors des causeries et counseling pour qu’elles comprennent que la PF a beaucoup d’avantages pour elles. Nous sommes également confrontés à des problèmes de violences conjugales. Certaines femmes adoptent les méthodes sans l’autorisation de leurs maris et quand ces derniers le découvrent après c’est tout un tas de problèmes pour nous. Certains maris nous convoquent chez le chef du village, d’autres encore nous menacent d’envoûtement. Mais, avec le concours de nos agents animateurs, de suivi et responsables communautaires, nous arrivons à résoudre le problème dans bien des cas.
Un message à envoyer lors de cette journée internationale de la femme ?
A toutes mes sœurs, je voudrais tout d’abord les remercier pour la confiance qu’elles mettent en nous pour l’atteinte de nos objectifs partagés. Confier leur santé en terme d’espacement de naissance à une personne comme nous, les ASC, nous encourage, à faire plus et j’invite les autres femmes qui continuent de douter pour l’adoption d’une méthode de se rapprocher de nous pour plus d’explications et d’informations. La planification familiale rend les femmes financièrement autonomes et les familles épanouies.
Propos recueillis par les JA SR/PF du Togo