Au Burkina Faso, ces dernières années, la région des Cascades tient la tête du peloton en matière de grossesses non désirées. En 2015, on y a dénombré 357 cas de grossesses non désirées. Cela préoccupe les organisations de la société civile de la région qui estiment que l’autonomisation des femmes et des filles est une solution pour révolutionner la planification familiale mais également éviter les grossesses non désirées. Echange avec des acteurs un après-midi du mois d’octobre dernier !
Chaque jour, une élève « pique » une grossesse non désirée dans la région des Cascades dont le chef-lieu, Banfora, située à plus de 400 km de la capitale burkinabè, Ouagadougou. Les chiffres de la direction régionale en charge de l’enseignement indiquent que la région a enregistré en 2015, 357 cas. Pire, de 2013 à 2014, sur 5076 cas de grossesses non désirées notifiés pour toutes les 13 régions du pays, les Cascades occupaient la tête du peloton avec 2562 cas. Pour le seul Centre de Santé et de Promotion Sociale (CSPS) de Mangodara, dans la province de Sindou, l’une des deux provinces de la région, il a été recensé de 2016-2017, 160 cas de grossesses non désirées. Ce qui indigne les acteurs de la société civile. «La situation est alarmante et nous avons eu l’occasion de le dire à qui veut l’entendre. Nous sommes la plus petite région du Burkina et le taux de grossesses non désirées dépasse le niveau national. Nous savons aussi que si le sexe est mal utilisé, il y a le risque de contracter les maladies sexuellement transmissibles dont le SIDA. Et toute la population est exposée », interpelle la coordonnatrice interprovinciale de la région des Cascades du Réseau Africain Jeunesse Santé (RAJS), Mme Awa Zabré. Pour elle, l’autonomisation des filles et des femmes devra leur permettre d’exprimer leurs besoins. Et cela commence d’abord, selon elle, par le droit des femmes de gouverner leur propre corps. «La femme doit savoir que son corps lui appartient et si elle veut l’utiliser à bon escient, que personne ne la déroute. Il faut que la femme ait confiance en elle-même et décide pour elle-même. Dans ce cas, aucune femme ne mettra au monde des enfants sans pouvoir s’en occuper », a-t-il poursuivi. L’autonomisation de la femme « c’est le last», soutient la coordonnatrice du centre Rakèta de lutte contre le VIH, Mme Fatoumata Tou. A l’entendre, il y a des femmes qui ne peuvent pas se procurer la plaquette de la pilule à 100 FCFA sans l’appui financier de leurs époux. « Si le détenteur du portefeuille n’est pas pour la contraception, elle est obligée de subir », lance-t-elle. Dans ce sens, le centre Rakèta de Banfora développe des initiatives pour rendre les femmes et les filles autonomes. Une unité de formation à la fabrication de savon a été mise en place. Et à ce jour, une cinquantaine de femmes ont été formées. A la fin de la formation, le patron du centre Rakèta, par ailleurs fondateur de la société de transport Rakèta, octroie des frais d’installation de 50 000 FCFA à chaque apprenante. Celle-ci a la possibilité de solliciter encore un prêt de 50 000 à 100 000 FCFA pour démarrer sa propre activité. L’autonomisation des femmes et des filles ne saura se traduire en réalité sans le concours de l’homme. « L’homme doit aussi accepter que la femme soit autonome. Il y a des hommes, voire des intellectuels qui ne veulent pas que leurs femmes réussissent financièrement ou intellectuellement. L’homme veut toujours avoir la femme sous sa coupe. Il faut laisser les femmes évoluer dans le respect du foyer. Mais il faut que les filles partent à l’école, restent à l’école et réussissent par l’école », souhaite la présidente de l’association RAMZYA pour le développement, Mme Mariam Bonkoungou. Dans cette partie du Burkina, les femmes attendent que leur autonomisation se traduise dans les faits pour leur mieux-être.
Boureima Sanga,
Publié le 10-01-2017 dans Sidwaya