C’est connu. L’épidémie d’Ebola (2014-2015) a entrainé des défaillances sur les systèmes de santé. Beaucoup de décès ont été enregistrés. Une situation similaire avec la COVID-19, selon la Directrice Régionale Afrique de l’Ouest et du Centre EngenderHealth, par ailleurs Présidente de la Coalition Sécurité Contraceptive en Afrique de l’Ouest (SECONAF/RHSC).
Elle se prononçait lors d’un webinaire organisé par Population Reference Bureau (PRB) Women’s Edition-Africa 2020, à l’intention des journalistes en santé. Ainsi, faisant sa communication sur la «COVID-19 et la chaîne d’approvisionnement en santé de la reproduction en Afrique de l’Ouest», elle soulignait les perturbations des chaînes d’approvisionnement sanitaires mondiales qui ont des conséquences socio-économiques désastreuses, sur la nécessité pour les gouvernements d’assurer la continuité de la fourniture des services essentiels de santé tels que la planification familiale, le travail et l’accouchement et la vaccination, le traitement du VIH et de la tuberculose.
Les chiffres effarants du mal
D’abord, en ce qui concerne la perturbation de la production, du transport et de la distribution de produits vitaux, y compris les contraceptifs, Néné Fofana Cissé a évoqué la rupture et possibilité de rupture de stock des principaux contraceptifs dans les mois à venir (Diu, implant, injectables) dans les 15 pays de la Cedeao (Bénin, Côte d’Ivoire, Ghana, Guinée-Bissau, Liberia, Mali, Niger, Nigeria, Sénégal, Togo…), préservatifs (d’après le rapport de planification et de suivi des achats – PPMR).
Selon elle, 46 pays de l’UNFPA sont menacés de rupture de stock des produits de base et des produits vitaux de la planification familiale, au cours des 4 prochains mois. Pire, des produits de la santé maternelle qui sauvent des vies risquent d’être également en rupture de stock dans les 6 prochains mois.
La Directrice Régionale EngenderHealth d’avancer qu’une étude de l’institut Gutmacher dans 132 pays à faible et moyen revenu (FMR) en 2020, a démontré la perturbation des soins essentiels de santé sexuelle et reproductive. A l’en croire, l’impact est la baisse de 10 % de l’utilisation des contraceptifs réversibles à courte et longue durée d’action. Les conséquences seront sans appel:
- 48 558 000 femmes supplémentaires ayant un besoin en contraceptifs non satisfaits,
- 15 401 000 grossesses non désirées supplémentaires,
- baisse de 10 % de la couverture des services essentiels liés à la grossesse et les soins aux nouveau-nés,
- 1 745 000 femmes supplémentaires souffrant de complications obstétriques majeures sans soins,
- 28 000 décès maternels supplémentaires,
- 2 591 000 nouveau-nés supplémentaires souffrant de complications majeures sans soins,
- 168 000 décès supplémentaires de nouveau-nés,
- 10 % des avortements passant de sécurisé à non sécurisé,
- 3 325 000 avortements dangereux supplémentaires et 1 000 décès maternels supplémentaires», a énuméré Néné Fofana Cissé.
Auto-injection, contraceptifs injectables : des pistes de solution
De l’autre côté, la perturbation sur le système de santé va impacter, entre autres, les rumeurs qui limitent la prestation de services, les messages inexacts aux clients et aux communautés, l’insuffisance des produits de sauvetage, des ressources humaines et financières, la perturbation du flux régulier de patients (y compris le dépistage, le triage et l’orientation ciblée des cas COVID-19 et non COVID-19) au sein des établissements de santé, la suspension des campagnes de vaccination (polio, méningite et rougeole) ainsi que la fermeture de certains services, en cas de contamination du personnel de santé par la COVID-19.
Par ailleurs, la Présidente de la Coalition Sécurité Contraceptive en Afrique de l’Ouest renseigne que des stratégies d’atténuation sont prévues à cet effet. Parmi lesquelles on peut noter l’adoption d’une approche holistique, intégrée et multisectorielle qui assure le maintien ou le rétablissement des produits et services essentiels, et renforce les systèmes de santé (couverture santé universelle et préparation des pandémies), l’accélération du «task shifting» et partage des tâches et la démocratisation de certaines pratiques telles que l’auto-injection des contraceptifs injectables etc.
Awa Faye
Publié le 11-08-2020 dans Seneweb