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Méthodes Contraceptives : Il faut vite tordre le cou aux idées reçues !

Les bienfaits de la planification familiale (PF) ne sont plus à démontrer. Il a été scientifiquement prouvé que les produits contraceptifs ne rendent pas stériles. Le planning familial permet en fait de donner une bonne santé à la mère et à l’enfant. L’accès aux services de PF est même un droit consacré au Burkina Faso par la Loi « Santé de la reproduction » de 2005 et par de nombreux autres textes nationaux, traités et pactes internationaux auxquels le pays a souscrits. Mais des préjugés relatifs à la pratique des méthodes contraceptives (stérilité par exemple) persistent. Pourtant ces préjugés ne devraient plus freiner une femme ni un couple qui se veut responsable de sa procréation.

Selon plusieurs investigations, il est ressorti qu’une population augmente de façon géométrique (2, 4, 8, 16, etc.) alors que les ressources économiques s’accroissent de façon arithmétique (1, 2, 3, 4, etc.). Il s’est cependant avéré aussi que la croissance démographique accroit automatiquement les besoins immédiats des populations.

Non maîtrisée, l’explosion démographique entrave les efforts de développement tout en aggravant les problèmes de santé, les inégalités de genre, la dégradation de l’environnement, la mortalité maternelle et néonatale, etc.

Certains analystes affirment qu’un taux de contraception de 30% permet autant de lutter contre la mortalité maternelle et infantile de 30%, car pensent-ils, les naissances rapprochées augmentent les risques de mortalité maternelle et néonatale.

2,1 enfants par femme est donc l’idéal, mais au Burkina, les statistiques font ressortir 6 enfants par femme. « C’est énorme », reconnaît le Directeur exécutif de l’Association burkinabè pour le bien-être familial (ABBEF), Boureihiman Ouédraogo.

Le droit de décider librement du nombre de ses enfants…

Face à toutes ces urgences, les gouvernements ont, il y a belle lurette, adopté et souscrit à des lois, plans, textes nationaux, traités, pactes internationaux, etc. dans le but de promouvoir ou de relancer la planification familiale.

C’est dire que le cadre juridique au Burkina est favorable à la pratique de méthodes contraceptives. Grâce à ces dernières, qui constituent l’un des éléments fondamentaux de la PF, la femme qui accouche observe un repos pour retrouver sa santé d’avant grossesse. C’est un choix guidé pour tout couple qui décide d’espacer librement les naissances.

L’article 8 de la loi 049 du 22 décembre 2005 portant Santé de la reproduction (SR) au Burkina Faso stipule entre autres que : «… Le droit à la SR est un droit fondamental garanti à tout être humain, tout au long de sa vie, en toute situation et en tout lieu (…) Les couples et les individus ont le droit de décider librement, et avec discernement, du nombre de leurs enfants, ainsi que de l’espacement de leurs naissances ».

Ladite loi fait, en outre, obligation à l’Etat, aux collectivités territoriales, aux groupements communautaires, etc., de veiller à la sauvegarde, à la promotion et à la protection du droit à la SR, dont la Planification familiale, pour tout individu.

Les produits contraceptifs sont ainsi consignés dans la liste nationale des médicaments essentiels au Burkina. Ces produits sont donc dans les normes. Des formations qualifiantes ainsi que les services s’y rapportant sont aussi disponibles. Les obstacles du début, qui empêchaient de se les procurer, se lèvent progressivement.

Mais les méthodes contraceptives n’ont pas eu l’effet attendu sur le taux de grossesses non désirées à travers le monde. C’est le constat que fait par ailleurs l’Organisation mondiale de la santé (OMS). L’ignorance reste encore un obstacle de taille dans de nombreuses régions du monde, selon l’OMS. La contraception post-coïtale est toujours inconnue dans de nombreux pays, pimentent certaines enquêtes démographiques et de santé et d’autres études nationales.

Au Burkina, les résultats de l’enquête démographique et de santé (EDS) de 2010 ont montré que 97% des femmes connaissent au moins une méthode contraceptive quelconque.

Quelques types de méthodes contraceptives disponibles…

Plusieurs méthodes sont utilisées pour espacer librement et contrôler les naissances au Burkina. Il y a des méthodes de courte durée (en général 1 à 3 mois). Il s’agit des méthodes orales, injectables et l’utilisation de préservatifs.

Il faut aussi signaler que de nouvelles méthodes contraceptives ont fait leur apparition : La contraception naturelle à l’ère du web 2.0. Cela consiste à décrypter les moindres signes du corps, maîtriser la période d’ovulation, les différents cycles de menstrues grâce notamment à l’utilisation d’outils TIC (Technologie de l’information et de la communication).

Il existe également des méthodes de longue durée (en général 5 ans, voire plus) : les implants et les dispositifs intra-utérins. Il y a cependant des méthodes définitives utilisées généralement lorsqu’une vie est menacée. C’est le cas de la ligature des trompes chez la femme et la vasectomie chez l’homme.

Il y a lieu de noter que comme tout produit médical, les produits contraceptifs peuvent aussi avoir des effets indésirables sur l’organisme, a précisé Dr Norbert Coulibaly, agent de l’UNFPA/Burkina, au cours d’un atelier à Ouagadougou.

Des préjugés hantent pourtant les produits contraceptifs…

Qui dit avortement dit non utilisation de méthodes contraceptives. Au Burkina Faso, certaines femmes préfèrent l’avortement à la contraception. Les préjugés sur les méthodes contraceptives ont provoqué 105.000 avortements clandestins en un an (rapport officiel 2012).

Non protégées, c’est naturellement que les femmes tombent enceintes même si elles ne le désirent pas. Elles se voient donc dans l’obligation de provoquer un avortement. Pourquoi préférer l’avortement à la procréation responsable alors que la loi autorise la femme à utiliser une méthode contraceptive même sans le consentement de son mari ?

D’autres personnes pensent que la contraception est une sorte de couverture pour la femme de tromper son homme. Le problème communicationnel d’actualité est lié aux nombreux préjugés qui hantent ces produits. Des préjugés tels que : « Ce n’est pas pour les jeunes filles, les produits contraceptifs font grossir, si on prend trop longtemps la pilule on risque de devenir stérile, la pilule provoque le cancer du sein, il est dangereux d’enchaîner les plaquettes de pilules, etc. ».

Nombre de personnes pensent que les méthodes contraceptives sont des techniques utilisées pour rendre les femmes stériles alors qu’il n’en est rien. Ces personnes font alors appel à des individus inexpérimentés qui utilisent un appareillage non stérilisé, de l’eau chaude, des bâtons ou encore des aiguilles à tricoter pour procéder à un avortement clandestin, qui n’est pas sans conséquence puisque beaucoup d’entre elles contractent des infections ou encore décèdent sur le coup.

Une jeune dame du nom de Fanta Traoré (hôtesse à Ouagadougou) confie préférer les dispositifs intra-utérins aux pilules. Elle raconte : « J’ai 28 ans, cela fait 5 ans que je suis avec mon copain. Pour une raison inconnue, j’ai rejeté la pilule que j’ai prise pendant 2 ans et demi. S’en ai suivi tout un tas d’essais d’autres méthodes. Il me fallait changer à chaque fois pour différentes causes : dépression, mal atroce dans la poitrine, plus de libido, plus d’acné, problème de circulation sanguine et j’en passe…

Sans oublier que pendant ces pilules, je n’avais plus mes règles, sympa quelques temps mais tout de même de sacrés frayeurs parfois de ne pas pouvoir vérifier que l’on n’est pas enceinte… A bout de force, on m’a posé un stérilet adapté aux jeunes femmes. Et je me sens maintenant libre… ».

Sollicité à propos des « fourmillantes » rumeurs sur ce sujet, « au contraire, la pilule a même tendance à favoriser la fertilité chez les femmes qui ont des troubles au niveau des ovaires », affirme un Médecin généraliste burkinabè en service d’IVG (Interruption volontaire de grossesse) en Centre de planification. Il a requis l’anonymat pour des raisons personnelles évoquées.

Il précise qu’en empêchant la croissance de kystes ovariens (des grosseurs dans les ovaires), la prise de la pilule diminue aussi le risque de cancer de l’ovaire. Mais que la pilule et le tabac font mauvais ménage. Il qualifie cela même de « catastrophique ».

Pourquoi ? « La pilule augmente le risque de caillots dans le sang. C’est aussi le cas du tabac. La combinaison pilule/tabac augmente les risques d’accidents vasculaires cérébraux, d’infarctus et de phlébite (caillot de sang) », répond-il.

Le Médecin généraliste fait savoir qu’il faut chercher une contraception adaptée à chaque femme. En fonction de son mode de vie (tabagisme), de son histoire (âge, risque vasculaire…), l’on doit choisir la contraception qui est préférable. Evidemment, si elle n’est pas adéquate, le gynécologue pourra la changer, pense-t-il.

« Ne pas supporter un type de contraception n’est pas une fatalité… Il est préférable de faire appel à un gynécologue dans un premier temps car les médecins généralistes sont moins bien formés à la prescription de contraceptifs. Par contre, une fois la contraception adaptée trouvée, le renouvellement d’ordonnance peut se faire par le médecin traitant », explique-t-il.

Il poursuit ensuite qu’il faut que le corps s’habitue à la prise d’hormones. « Le cycle physiologique va être modifié et le corps devra retrouver un nouvel équilibre. Et ça peut prendre du temps. Il faut attendre la prise de 2 ou 3 plaquettes (2 ou 3 anneaux, 2 mois avec un stérilet par exemple) pour savoir si la pilule est adaptée ou non.

Sauf effet indésirable très important, il ne faut pas arrêter une pilule 15 jours après le début sous prétexte qu’elle n’est pas adaptée. Le corps n’a pas encore eu le temps de s’y adapter », dit-il. Enfin, le Médecin soutient qu’il est utile de revoir son gynéco au bout de 3 mois et d’évaluer avec lui les effets secondaires et un possible changement de contraception.

Il faut reconnaitre que beaucoup d’efforts sont faits au Burkina en matière de SSR/PF. Par exemple pour la mise en œuvre du plan national de relance de la PF, le gouvernement a pu s’appuyer sur différents partenaires de mise en œuvre.

Au nombre de ces acteurs, l’on a les partenaires techniques et financiers : UNFPA, les bailleurs de fonds soutenant le Partenariat de Ouagadougou (Agence française de développement, Bill et Melinda Gates Foundation, Hewlett Foundation, ministère des affaires étrangères de la République française, USAID), les ONG et associations (ABBEF, BURCASO, EngenderHealth, Equilibres & Populations, MSI, PROMACO, URCB).

Il est important de continuer dans ce sens, mutualiser les efforts pour également lutter contre les fausses croyances et réduire le taux d’avortement. Les programmes de planification familiale doivent être renforcés. Il faut vite briser les gènes, les réticences et les tabous qui entourent la question de la contraception dans les ménages. Il faut également renforcer le plaidoyer auprès des leaders villageois et sensibiliser les communautés à la PF notamment par les agents de santé communautaires.

Il faudrait aussi encourager ces nombreuses organisations non gouvernementales qui tentent de briser ces préjugés et d’apporter leur aide à travers des lignes d’écoute ou encore des distributions gratuites de moyens contraceptifs afin que les femmes qui ne souhaitent pas tomber enceintes puissent trouver d’autres solutions que l’avortement.

Noufou KINDO

Burkina 24

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