Interview avec Mme Elback Zeinabou Tari Bako, Ministre de la Promotion de la Femme et de la Protection de l’Enfant à l’occasion de la Journée Internationale de la Femme.
Mme la ministre, la Journée Internationale de la Femme est célébrée aujourd’hui 8 mars dans tous les pays du monde. Pouvez-vous nous faire un bref rappel historique des circonstances qui ont conduit à l’institution de cette journée ?
Merci de l’opportunité que votre journal me donne pour parler de cette importante journée que le Niger, à l’instar des autres pays de la Communauté Internationale, célèbre aujourd’hui 8 mars 2019. En effet, cette journée a été proclamée par l’Assemblée Générale des Nations Unies à l’occasion de la décennie de la femme en 1975 pour commémorer les marches historiques des femmes de 1907 et 1908 afin de revendiquer leurs droits au suffrage.
Quel est le thème retenu pour l’édition 2019 et qu’est ce qui justifie le choix de ce thème ?
L’édition 2019 a pour thème : «Promotion et Accès aux infrastructures durables au service de l’égalité de genre et de l’autonomisation des femmes et des filles ». Il est tiré du thème prioritaire de la 63ème session de la Commission de la Condition de la Femme intitulé: « Les systèmes de protection sociale, l’accès aux services publics et les infrastructures durables au service de l’égalité des sexes et de l’autonomisation des femmes et des filles», prévu du 11 au 22 mars 2019 à New-York.
En effet, le choix de ce thème n’est pas fortuit car nous pouvons aisément affirmer qu’aujourd’hui, le développement durable d’un pays ne peut être effectif sans la promotion et l’accès aux infrastructures durables au service de l’égalité de genre et de l’autonomisation des couches représentant plus de la moitié de la population, que sont les femmes et les filles. Il s’agit d’attirer l’attention des autorités et des partenaires au développement sur l’importance de l’accès des femmes et des filles aux infrastructures durables en vue de leurs capacités en entrepreneuriat et en leadership.
Mme la ministre, à l’instar des autres pays du monde, le Niger va donc célèbrer aujourd’hui 8 mars, la journée internationale de la femme. Comment cette journée sera commémorée cette année dans notre pays ?
Au Niger, cette journée du 8 mars sera célébrée dans toutes les Régions. Plusieurs activités sont prévues par le Ministère, les Partenaires Techniques et Financiers ainsi que les Organisations de la Société Civile. Le Ministère a prévu un atelier de partage des documents des panels du Niger à la 63ème session de la Condition de la Femme qui se tiendra à New York du 11 au 22 mars 2019 et le lancement du site WEB du Ministère de la Promotion de la Femme et de la Protection de l’Enfant.
Depuis quelques années, l’accent est mis dans notre pays sur l’autonomisation des femmes. Quelles sont, Mme la ministre, les actions d’envergure menées dans ce cadre par votre département ministériel en vue d’améliorer la situation socio-économique de la femme nigérienne ?
Effectivement, depuis quelques années, dans notre pays, l’accent est mis sur l’autonomisation des femmes, en particulier celle des femmes rurales. La pauvreté touche 45,4 % des nigériens selon l’Enquête sur les Conditions de Vie des Ménages et de l’Agriculture (ECVMA) de 2014. Elle touche plus le milieu rural avec 94,1% des ménages et 4 femmes sur 5 sont pauvres. En plus de la pauvreté, les femmes sont confrontées à plusieurs défis dont entre autres l’analphabétisme, leur faible représentativité aux postes de prise de décision, la sous-scolarisation des filles et leur maintien à l’école, le mariage précoce, pour ne citer que ceux-là. Face à cet état de fait, le Gouvernement Nigérien est entrain de déployer d’importants efforts en vue d’accroitre le rôle des femmes dans le domaine socio-économique et leur réussite vers un développement durable.
Dans ce cadre, mon département ministériel mène plusieurs actions. Il s’agit notamment de: l’Initiative pour les Adolescentes du Niger « Illimin » qui vise à réduire les mariages précoces et retarder les grossesses précoces; l’adoption de la Stratégie Nationale de l’Autonomisation Economique de la Femme en 2017 et son plan d’action quinquennal 2017-2021; l’adoption de la Stratégie Nationale de Prévention et de Réponse aux Violences Basées sur le Genre en 2017 et son plan d’action quinquennal 2017-2021 ; le Projet Régional Autonomisation des Femmes et Dividende Démographique au Sahel qui vise à accélérer la transition démographique à travers la réduction du taux de fécondité et de la mortalité infantile, en vue de la capture du dividende démographique ; le projet Autonomisation des Femmes et Développement Local ; la mise en place des plateformes multifonctionnelles pour l’allégement des tâches domestiques des femmes ; l’octroi des crédits.
Mme la Ministre, malgré l’existence de plusieurs projets et programmes initiés en matière d’autonomisation des femmes, la pauvreté touche la majorité des femmes au Niger. Comment expliquerez-vous cela ? Quelles sont les stratégies que vous comptez développer pour améliorer la situation socio-économique de la femme surtout en milieu rural ?
On constate en effet que malgré l’existence de plusieurs projets et programmes initiés en matière d’autonomisation des femmes, la pauvreté touche la majorité des femmes au Niger. Cela peut s’expliquer par le fait que le pouvoir économique de la femme est très faible et la plupart de leur revenu va dans l’entretien de la famille.
Pour améliorer la situation socio-économique de la femme surtout rurale, nous comptons poursuivre les actions en cours et développer les stratégies ci-après : la mise à l’échelle des plateformes multifonctionnelles ; le renforcement des capacités économiques des femmes à travers la mise en œuvre de la Stratégie Nationale de l’Autonomisation Economique des femmes. Etc.
La participation politique des femmes est aussi une autre préoccupation au Niger. Comment faire pour que les droits des femmes, de plus en plus nombreuses dans les partis politiques, soient respectés ?
C’est juste, la participation politique des femmes est aussi une autre préoccupation au Niger. En vue d’améliorer leur participation dans les instances de prise de décision, des mesures et des actions ont été menées à savoir l’adoption de la loi N° 2014_64 du 5 novembre 2014 modifiant et complétant la loi N°2000- 008 du 7 juin 2000 instituant un système de quota dans les fonctions électives et nominatives qui a revu à la hausse le quota des postes électifs passant de 10 à 15% ; le renforcement de capacités en leadership ; la sensibilisation ; le plaidoyer, des ateliers d’échange sur la thématique participation politique des femmes. Pour que la femme puisse participer à la gestion de la vie publique, il faut nécessairement qu’elle soit autonome sur le plan financier, social. C’est pourquoi dans le souci de promouvoir les droits des femmes, nous envisageons d’élaborer et de mettre en œuvre un Programme National de Promotion du leadership féminin.
Fatouma Idé
Publié le 08-03-2019 dans le sahel