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Planification Familiale « Elle ne se limite pas à la distribution de méthodes contraceptives » selon Claude Béatrice Sawadogo

La planification familiale ; c’est sur elle que notre rubrique porte cette semaine. Béatrice Sawadogo, sage-femme au CSPS de la trame d’accueil du secteur 28 à Ouagadougou, nous parle de long en large de cette pratique. Lisez !

« Le Pays » : Qu’est-ce que la Planification familiale (PF) ?

La Planification Familiale (PF), selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), se définit comme une manière de vivre que les couples adoptent de leur propre volonté, en se basant sur des connaissances très précises et des attitudes réfléchies afin d’améliorer l’état de santé et le bien-être du groupe familial. Par conséquent, cette manière de vivre contribue efficacement au développement social du pays. Dans notre système de santé, on définit la PF autrement, comme un ensemble de mesures techniques, psychologiques, éducatives qui permettent aux couples et aux individus d’atteindre certains buts en fonction de leurs possibilités et de leurs désirs ; ce qui favorise la naissance désirée et l’espacement des naissances et évite aussi les grossesses non désirées en aidant les couples à déterminer le nombre d’enfants qu’ils souhaitent avoir.

La PF peut-elle être pratiquée par toutes les femmes ?

Bien sûr ! Elles peuvent et même doivent l’adopter, parce qu’elle a beaucoup d’avantages pour tout le monde. La PF permet à la femme de se reposer entre deux accouchements et permet d’être disponible sexuellement vis-à-vis du mari afin de jouir de sa sexualité et de mieux s’occuper des enfants. La PF évite non seulement les grossesses tardives car son rôle n’est pas seulement la distribution des méthodes contraceptives, mais favorise aussi la prise en charge de l’infertilité et de l’infécondité. Elle prévient les IST et le VIH. La PF diminue la mortalité maternelle, permet à l’enfant de profiter du lait maternel et renforce l’amour maternel chez l’enfant. Pour le père, la PF lui permet de faire de  bonnes économies et d’avoir des relations sexuelles beaucoup plus libres avec sa conjointe, toute chose qui contribuera à ce qu’il ait une famille harmonieuse. Donc, tout le monde doit l’adopter comme une manière de vivre.

Comment appréciez-vous l’accès à la PF au Burkina ?

Au Burkina, la pratique de la PF a fait d’énormes progrès, mais il reste encore des insuffisances à combler, notamment l’accès aux services de cette PF. Car il  y a des indices qui le montrent. Quand on prend l’indice synthétique de fécondité, qui est de 5, 4 enfants par femme, on se rend compte qu’il n’est pas comparable aux indices des pays européens et asiatiques. La prévalence contraceptive qui est de 22,5% est très basse, et quand on prend l’indice des besoins non satisfaits en PF qui est de 19, 4%, il est très élevé. Donc, l’un dans l’autre, nous ne sommes pas satisfaits quant à l’accès à la PF et nous pouvons mieux faire. Car  la non-utilisation des méthodes contraceptives est un facteur qui contribue à un taux de natalité assez élevé et contribue aussi à un taux élevé de mortalité maternelle qui se situe à 330 décès maternels pour 100 000 naissances et cela est très énorme.

Est-ce que les services disponibles à la PF sont accessibles à toutes les femmes ?

Reconnaissons que l’accès à la PF est beaucoup plus faible  au niveau des femmes rurales. 90% des femmes rurales n’ont pas accès à des méthodes de PF et pour cause, le manque de centres de santé.

A quel âge une fille peut-elle prendre des méthodes contraceptives ?

Toute fille ou tout garçon qui est prêt sexuellement, c’est-à-dire actif ou active, doit bénéficier de l’éducation qui n’a pas forcément un lien avec la méthode contraceptive. Mais comme la PF fait partie de l’éducation sexuelle, la jeune fille ou le jeune garçon qui bénéficie de cette éducation sexuelle, saura qu’avant d’être sexuellement actif, il ou elle  doit forcément avoir affaire à une méthode contraceptive s’il/elle ne souhaite pas avoir une grossesse non désirée. Scientifiquement, on a appris qu’une femme, avant de faire une méthode contraceptive, devait d’abord passer par la maternité, c’est-à-dire avoir accouché au moins une fois. Mais cela est plus ou moins caduc, parce que les filles  retardent beaucoup plus leur première maternité alors qu’elles sont sexuellement actives et c’est la même chose chez les garçons. Avant d’être sexuellement active, toute jeune fille ou jeune garçon doit bénéficier d’une éducation sexuelle adéquate et par ricochet, avoir accès à une méthode contraceptive.

Combien de sortes de méthodes contraceptives existe-t-il ?

Il y a des méthodes naturelles ( MAMA ; collier ou méthode des jours fixes) ;   les méthodes de barrière (les condoms masculin et féminin, les spermicides) ; les méthodes hormonales  de contraception et dans ces méthodes hormonales on peut citer les pilules  subdivisées en pilules Combinées ou estro progestatifs (COC), les pilules à seul progestatif (psp) ; les injectables, les implants et le dispositif intra utérin. Il y a aussi la CCV (la Contraception chirurgicale volontaire), la ligature des trompes pour la femme et la vasectomie pour l’homme. Il y a enfin  la contraception d’urgences qui est une   méthode ponctuelle de contraception pour une femme qui n’est sous aucune méthode contraceptive et qui a eu des rapports à risque ; elle  peut  prendre une pilule appelée  pilule du lendemain, pour éviter de contracter une grossesse. A côté des méthodes naturelles et modernes, il y a aussi les méthodes traditionnelles comme  la séparation du couple et l’abstinence dont on ne fait pas la promotion, car elles ne favorisent pas l’harmonie du couple, n’entrent pas dans le cas de la santé sexuelle et reproductive.

Est-ce que ces méthodes sont fiables à 100% ?

Les méthodes modernes ont une fiabilité qui tend vers les 100%. Parce que quand on prend les dispositifs intra utérus, ils ont un taux d’échec entre 1 et 2%. Donc, on peut dire que le taux de réussite des méthodes modernes est de 98 ou 99%.

Citez-nous des effets secondaires des méthodes contraceptives.

Les effets secondaires ne manquent pas. Mais cela ne veut pas dire que toute femme qui utilise une méthode contraceptive, doit forcément avoir des effets secondaires, car cela est variable d’une femme à une autre. Par contre, certaines, dès le départ, vont réagir avec des nausées, des maux de tête et des douleurs à la poitrine, aux jambes, à l’abdomen et des troubles visuels. Les effets secondaires  ne sont vraiment pas les mêmes chez toutes les femmes. D’autres, en utilisant des méthodes contraceptives, peuvent maigrir ou prendre du poids. Voilà pourquoi  il est demandé à toutes les femmes, si toutefois elles ressentent des changements pendant l’utilisation, qu’elles fassent recours à une sage-femme pour un conseling et changer de méthode s’il le faut.

D’aucuns disent que l’utilisation des méthodes contraceptives est la porte ouverte « au vagabondage sexuel ». Que répondez-vous ?

La PF ne se limite pas à la distribution de méthodes contraceptives. Elle est incluse dans la santé sexuelle et reproductive qui comporte l’éducation  sexuelle. On doit faire comprendre à toute personne qui utilise une méthode contraceptive, que cela l’aide à ne pas tomber enceinte mais ne l’empêche pas de tomber malade. Donc, si l’offre de cette planification n’est pas suivie d’une éducation, cela peut virer à autre chose. Donc, ceux qui pensent à cela, se font de fausses idées.

Etes-vous satisfait de l’utilisation des contraceptifs ?

Le taux de prévalence qui est de 22,5% ne nous satisfait pas, d’où l’intérêt du plan de relance. Dans les objectifs du plan de relance, d’ici 2020, nous devons atteindre 32% comme taux de prévalence.

Comment peut-on définir le plan d’accélération 2017-2020 ?

Le plan national d’accélération de la PF 2017-2020 est un guide mis en place pour tous les programmes de PF du gouvernement et de ses partenaires. C’est un outil de mobilisation de ressources, qui contient une feuille de route spécifique pour accélérer les méthodes  entreprises au cours de la PF pour augmenter le taux de prévalence  à contraceptif moderne à 32% d’ici 2020.

Quels sont les objectifs de ce plan ?

C’est de contribuer à l’amélioration de la santé de la population par l’accroissement du taux du contraceptif moderne de la femme en union comme présenté plus haut. Avec un budget d’environ 28 milliards de F CFA.

Autre chose à ajouter ?

J’insiste sur le fait que la PF ne veut pas dire limitation des naissances ni avortement. Mais plutôt un espacement des naissances  pour permettre d’avoir des familles harmonieuses, qui vont produire une société harmonieuse. Je souhaite aussi que les avantages et le bon côté de la PF soient mis en exergue.

Valérie TIANHOUN

Publié le 21-03-2018 dans Le pays

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